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I40           DIVAGATIONS ET MENUS PROPOS

   On peut choisir dans les œuvres musicales d'une date
antérieure à la seconde moitié de ce siècle, un certain nom-
bre de mélodies d'un charme inaltérable et ne laissant
aucune prise aux atteintes de la vieillesse et aux caprices de
la mode. D'où leur vient cette vitalité, cette puissance de
séduction ? de ce qu'elles sont l'expression d'un sentiment
vrai, d'une inspiration du cœur et non d'un travail pénible
et de la substitution des grimaces au sentiment. J'en ren-
contre de cette valeur non seulement chez les maîtres hors
ligne, mais parfois chez des compositeurs novices, n'ayant
reçu qu'une ou deux fois la visite de la muse. Dans Mozart,
on puise à plein vase, dans Rossini également; il n'est pas
jusqu'à Dalayrac et Auber qui n'apportent leur contingent
de phrases charmantes, trouvant de suite la note qui émeut,
comme dans la romance de Nina et dans celle de la Part
du Diable.
   Un autre signe de décadence dans la musique actuelle,
c'est l'ignorance ou le mépris des lois de la prosodie. Quand
on applique un chant sur des paroles, les notes doivent
correspondre à la quantité de chaque syllabe autant que
faire se peut, car en certaines occurences on est forcé de
transgresser la règle, mais, en thèse générale, mettre une
note brève sous une syllabe longue ou une note longue
sous une syllabe brève, c'est absurde, c'est un contresens,
un accroc au bon sens et à l'oreille. Cela se fait aujour-
d'hui sans vergogne, pourquoi ? Cherchez la cause, cher-
chez les causes de tant d'incongruités analogues.
   Exemple bien connu : dans le premier vers de chœur des
soldats de Faust, musique de Gounod, toutes les valeurs
sont à contresens.
   Les musiciens français ne tombaient pas autrefois dans ce
travers et respectaient les lois de la quantité. Grétry s'est