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CHRONIQUE LOCALE, 247 lait parfaitement plurent infiniment au poète ; on sait tout ce que ce langage a d'imagé et de séduisant ; c'est presque l'espa- gnol pour la majesté et l'italien pour la douceur. Pendant toute la soirée, M. de Lamartine ne se lassa pas de solliciter des récits et des chansons. On se souvient des moindres événe- ments qui touchent aux hommes illustres ; aujourd'hui encore, l'interlocutrice de M. de Lamartine aime à conter ce fait de ses jeunes années, et le directeur de la Revue le consacre pieuse- ment car cette dame était sa mère. Chaque fois que M. de Lamartine venait à Lyon, il visitait Terreneuvé, où ses parents l'accueillaient avec la joie du cœur. Sa correspondance, que nous avons vue souvent, faisait foi de la tendresse qu'il leur avait vouée et qui a vécu jusqu'à leur dernier jour. De l'avis de tous, le poète a honoré la France. L'homme poli- que n'appartient pas au jugement d'un Revue littéraire, mais qu'il nous soit permis de publier des vers que nous communi- que un de nos plus élégants collaborateurs et qui nous parais- sent apprécier Lamartine, comme l'appréciera l'avenir : LAMARTINE. Il est mort, et sa tombe est à peine fermée : C'est l'instant de juger sa haute renommée, Sans haine, sans faveur, mais en prenant le deuil. Fut-il grand citoyen ? — Je comprends qu'on hésite ; Mais il fut grand poète, et sa gloire mérite Qu'on ne prononce plus son nom qu'avec orgueil ! Car sa gloire est la nôtre, et si parfois son rêve, Pareil à ces brouillards qui flottent sur la grève, Sans forme ni couleur s'évanouit dans l'air ; Plus souvent, à pleins bords, et d'un jet admirable, Il s'élance, roulant autant d'or que de sable, Comme un fleuve sacré qui descend à la mer ! Honorons le génie, et, faibles que nous sommes, Au poids de nos vertus ne pesons pas les hommes Qui furent en naissant marqués du sceau divin ; Les grandes passions, mères des chants sublimes,* Des profondeurs du ciel, les jettent aux abîmes,.. Dieu fait bien ce qu'il fait, et ne fait rien en vain.