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510 FRAGMENT HISTORIQUE.
« qu'on traite avec générosité un magistrat qui est devenu
« le prisonnier de guerre d'un peuple magnanime.
« Lyon, le 26 novembre 1830. »
Suivent les signatures.
M. le président Pasquier reçut cette requête ; il en fit une
pièce du procès ; elle fut connue des juges et des accusés.
Il était clair que, dans l'opinion du barreau, le parti
vainqueur de ce conflit politique devait paix et sécurité au
parti vaincu; l'avocat de M. de Chantelauze en fut pénétré;
et à la séance de la Chambre des Pairs du 20 décembre, il
parla en ces termes (Moniteur du 21).
« Il est donc permis, Messieurs, de croire que M. de
« Chantelauze sera rendu aux sympathies qui sont venues
« l'accompagner dans ces tristes débats, au désir de tout
« un barreau qui a donné tant de gages au gouvernement
« constitutionnel. Tous ceux qui l'ont connu, se sont em-
« pressés de rendre hommage à ses vertus, à sa sagesse
« éclatante, à sa bonne foi, et de lui donner un haut cer-'
« tificat de moralité constitutionnelle. Le barreau n'a vu
« dans la révolution de 1830, qu'une bataille. 11 vous a
« demandé, en pesant bien tous ses termes, de juger M, de
<•<. Chantelauze en prisonnier de guerre. »
Le langage du défenseur s'empara du cœur dès juges. Que
la mémoire lui en soit chère jusqu'à son dernier jour! il a
été heureux, et il en avait bien le droit, après un laps de
trente années, de reproduire fidèlement, dans une solennité
littéraire, son sentiment et celui de notre barreau : « que
« cette lutte armée, où la bonne foi pouvait se trouver des
« deux parts, ne devait laisser que des prisonniers de
« guerre et non des accusés. »
Marc-Antoine PÉRICAUD.
Lyon, le 23 mai 1860.