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ÉLOGE DE M. DE CHANTELAUZE. 369 des Pairs ; c'est désormais une page d'histoire et je ne ré- siste pas au désir de la relire devant vous. « Paris, ce 18 mai 1830. « Ma présence a Paris doit, mon cher ami, te causer « quelque surprise ; tu en éprouveras davantage demain a « la lecture du Moniteur qui contiendra ma nomination de « Garde des Sceaux. Je la regarde comme F événement le « plus malheureux de ma vie et il n'est rien que je n'aie fait « pour y échapper. Voila bientôt un an que je résiste; « nommé ministre, le 17 août dernier, j'ai été assez heureux « pour faire agréer mon refus. Pendant mon dernier séjour « ici, j'ai également fait échouer de semblables tentatives à « Grenoble ; c'est le 30 avril que j'ai reçu les ordres du Roi; « M. le Dauphin, a son passage, m'a vivement pressé, j'ai « été ferme dans mon refus et je croyais la chose finie à « mon avantage; mais le 12 de ce mois, une dépêche télé- « graphique m'a prescrit de me rendre à Paris. Arrivé de- « puis trois jours, je n'ai pas perdu un instant pour empê- « cher un choix aussi peu convenable qu'utile. Mes excuses « n'ont pas été goûtées, et je cède a des ordres qui ne per- « mettent que l'obéissance. Ainsi, regarde-moi comme une « victime a immoler et plains moi. » Une telle lettre ne se commente pas. Cette fuite sincère des grandeurs, cette triste et volontaire immolation au péril, porte un caractère antique et touchant qu'on n'imitera pas souvent, qu'on admirera toujours. Il était victime en effet, le sacrifice ne se fit pas attendre. Il s'y était dévoué avant son avènement au pouvoir. Le gant était jeté ; la royauté se voyait menacée ; elle avait juré qu'elle ne rendrait pas son épée ; le conflit était inévitable. M. de Ghantelauze fut appelé a se prononcer sur la presse, ce grand problème des sociétés modernes, fléau tour a tour 24