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DE LA TÉTE-D'OK. 215 ture, ont la prétention de lui en donner. Pour appuyer mon dire, nos expositions exhibent des paysages incroyables, au point de vue delà forme, et même de la couleur et de l'effet. Les auteurs peu- vent se vanter justement d'avoir produit de véritables créations, et leurs rochers pourraient parfaitement servir de modèle, pour ceux que construisent de prétendus dessinateurs de jardins, entièrement étrangers à l'art et à la géologie. Un tableau, plein de couleur locale, était celui que présentait le bois de la Tète-d'Or, le dimanche, par une belle journée d'été. On pouvait le proposer comme une curiosité, à l'attention de l'étranger. La couleur locale, ce trésor des artistes et des poètes, devient de plus en plus rare et bientôt tout se ressemblera tel- lement, choses et gens, que l'uniformité — ce prétendu progrès de notre temps — la remplacera entièrement. L'immense popu- lation, dont les flots envahissaient tout le quartier de la Tête- d'Or, trouvait des chemins ombragés, à peu de distance du pont Morand, et la campagne commençait presque aussitôt pour les promeneurs. Quand on suivait les bords du Rhône, on faisait une première étape à l'île de Robinson, dont Leymarie, de si aimable mémoire, a donné une description dans le Lyon vu de Fourvière. L'île de Robinson était effectivement un îlot qui surgissait au milieu d'une espèce de lac, alimenté par la filtration du Rhône. Cette flaque d'eau dépendait d'une auberge, à l'enseigne de l'île de Robinson, flanquée d'une vaste éeurie en planches, où s'arrêtaient les équi- pages, montant et descendant le fleuve. Les gens de la ville allaient y manger les bon poissons du Rhône, qui figuraient sur toutes les guinguettes riveraines. La maison existe encore der- rière un massif de constructions neuves, situé près du pont de Saint-Clair. Le Rhône passait au bas du talus qui la portait, et l'on peut, d'après cela, juger de l'espace conquis par notre épo- que sur le lit de la rivière. Tout les artistes se rappellent certai- nement le petit pont jeté sur la communication entre le lac et le fleuve : il était flanqué de peupliers vigoureux, et il a souvent servi d'étude aux paysagistes. Ce quartier de l'île de Robinson était admirable de verdure et de fraîcheur : « Je sais par cœur,