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LETTRES CE F. OZANASf. 85 une maison qui console la vue ; un sol volcanique, un air qui consume, seulement de temps à autre un troupeau de buffles noirs, avec des bergers armés comme des voleurs, errants comme des sauvages ; puis tout à coup apparaît une croix radieuse, portée sur une boule dorée et vous saluez le dôme de St-Pierre. Voilà pour les abords; mais du moment où vous avez franchi la Porte du Peuple qui s'élève majestueuse devant vous, la mul- titude des monuments vous annonce que vous êtes dans la reine des cités. Suivez cette rue si longue que vous trouvez la première et vous arriverez au Capitule, au milieu d'une allée de palais ; au Capitole, dépouillé de sa vieille gloire, où il ne reste plus une pierre du temple fréquenté par tants de triomphateurs, mais re- vêtu d'une splendeur nouvelle, et réunissant, dans trois superbes édifices, le siège des magistrats de Rome moderne et la collection des bustes de tous les grands hommes de l'Italie. Maintenant, avancez un peu encore, frappez à la porte de ce jardin et vous serez debout sur la roche tarpéienne. Alors vous aurez à vos pieds ce Forum où s'agitaient tant de milliers de Romains, et qui, revenu à ce qu'il était du temps des vieux Latins, s'appelle au- jourd'hui Campo-Vaccino. Cependant, il n'a point encore perdu le. reste de ses pompes passées ; çà et là , des colonnes debout marquent les vestiges du temple de Jupiter Tonnant et de Jupiter Stator. A droite, voici les ruines du somptueux palais des empe- reurs ; à gauche la basilique de Constantin. Trois arcs de triom- phe d'une grandeur imposante tracent encore l'immense Voie sacrée et pour terminer la perspective, l'immense Colysée, le plus beau des monuments que Rome païenne ait légué à Rome chrétienne, et Rome chrétienne s'en est montrée digne ; car, sur cet amphitéâtre inondé du sang des martyrs, elle n'a planté qu'une croix de bois. Pendant que ce spectacle occupe vos re- gards, vous avez derrière vous les deux colonnes Antonine et Trajane, hautes, chacune, de plus de 100 pieds, et le Panthéon d'Agrippa, et la tour d'où Néron vit brûler Rome et alors, à moins que vous ne vouliez glaner quelques vieux débris au coin des rues, vous avez vu la vieille ville romaine dans ses décombres. Il est temps d'aller voir la cité catholique dans sa magnificence.