page suivante »
DE LA PRIÈRE. 529 en voyage s'il arrivait aussitôt que sa volonté ! Mais il est obligé de se soumettre à la successivité de l'espace et du temps. Il en est de même de nos innombrables actes en cette vie; car quel est celui qui ne veut mille fois plus qu'il ne peut ! Tout homme qui entreprend a déjà sa volonté appuyée sur son but. La volonté, au dedans de l'autre monde, ne fait aucun effort ; mais dans celui-ci, il est établi qu'elle ne peut rien opé- rer qu'à force de peine. Car ce n'est que dans la peine que l'homme se forme une volonté à lui, et se fonde, vis à vis de l'absolu , une personnalité. Ce n'est qu'à la peine, également, qu'on juge la quantité d'amour qui en- trelient la volonté. Aussi ce monde a été organisé pour être expressément en obstacle à la volonté, et lui faire expri- mer en quantité réduite les mouvements incommensurables qu'elle produit dans l'ordre absolu. De là la palience est la condition de tout succès de la vo- lonté. Courons par la patience, dit Saint Paul. Soumise ici-bas à la successivité, au lieu de produire instantanément, la vo- lonté est donc forcée de suppléer par la durée de son vouloir à la petitesse des opérations du corps. Les organes ne répon- dant que par des fractions infinitésimales à sa grande et totale demande, nous n'avons jamais pu nous faire sur celte terre une idée du pouvoir de la volonté. Que serait-elle donc, même ici-bas ! si on la démuselait, en la retirant des or- ganes.... Encore, ne serait-elle qu'au sein de l'espace. Eh bien ! jugeons de ce que peut la volonté dans sa véritable sphère, alors qu'elle n'a plus besoin de passer par l'intermé- diaire des organes, alors qu'elle n'est plus brisée comme une poussière dans la successivité du temps, alors que reprenant ses dimensions et rentrant en toute indépendance au milieu de l'absolu, elle va retentir dans le sein profond de l'amour ; et nous comprendrons ce que peut la volonté dans le monde