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VOYAGE A VIENNE. 273 baldaquin, dont Soliman I I se servit pour entraver la navigation du Danube, quand il assiégea Vienne , en 1529. Cet immense trophée est bien autrichien ; car ce ne fut qu'en 1683 que Jean Sobieski, cet homme envoyé de Dieu, qui avait nom Jean , vint au secours de Vienne et la délivra avec ses légions polonaises.— Grand Sobieski ! Pauvre Pologne!... Dans ce curieux arsenal, l'Autriche montre orgueilleu- sement les drapeaux pris par elle pendant les guerres de l'empire français, comme si, de son côté, la France ne possédait pas une collection plus nombreuse de drapeaux autrichiens! J'en remarquai un qu'on désigne comme ayant été brodé par Marie-Louise. Celui-là leur appartient bien de plein droit ; mais s'il rappelle nos revers , ne rappelle-t-il pas aussi leur humiliation? Pour qui donc était l'abaissement quand les archiduchesses d'Autriche brodaient nos étendards? Marie-Louise elle-même n'était qu'un trophée de Napoléon. Telle est la France : quand on croit l'abaisser d'un côté , elle se relève de l'autre. Il eût été convenable d'y regarder de plus près et d'y mieux songer avant d'exposer, avec une vanité naïve, ce trophée à deux faces. Un autre voyageur, qui l'a remarqué comme moi, dit à ce sujet qu'il faut que la duchesse de Parme n'ait jamais visité l'arsenal. L'Autriche n'a pas toujours une prévoyance spirituelle dans l'étalage qu'elle fait des choses qu'elle a prises à la France. Ainsi elle montre avec satisfaction le ballon dont se servit le maréchal Jourdan , a Fleurus , pour observer et apprécier les dispositions et les mouvements des impériaux. Ici encore la France a celte bonne réponse â faire : —Oui, le ballon vous est resté ; mais à qui resta le champ de bataille et la victoire ? Il n'y a pas là lieu à trophée. A l'occasion d'une défaite, ce serait un orgueil déplacé , si c'était de l'orgueil ; mais c'est simplement ce goût de collecteur qui 18