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268 VOYAGE A VIENNE. orientale, unissant ainsi l'Europe à l'Asie, quelle haute destinée ! C'est bien ce maigre lieutenant, sorti de l'école de Brienne, qui se fait Empereur à travers toutes sortes de luîtes et de prodiges ! De môme la merveilleuse destinée du grand fleuve ne s'ac- complit qu'à travers les plus puissants obstacles et a l'aide de mille sinuosités contradictoires : on ne marche pas tout droit a une pareille fortune. Les plus hautes montagnes de la Ba- vière, de la Souabe, de la Styrie, de la Bohême, du Tyrol, toutes ces branches complexes des Alpes, le poussent et le repoussent, lui font un cours tortueux, tourmenté; mais elles l'enrichissent en môme temps de tous les torrents, de toutes les rivières qui tombent de leurs pentes, et le forcent, pour ainsi dire, à se multiplier par ses utiles détours. Les Cra- packs aussi le font dévier, ici au sud et là à l'ouest, comme s'il avait perdu sa voie, au point qu'on croirait qu'il va se tromper de mer et se jeter dans l'Adriatique, quand les Alpes de l'Illyrie et de l'Esclavonie le remettent sur son chemin. Une autre fois, pour ainsi dire induit en erreur, et refoulé vers le midi par les Grapacks, il va manquer à sa vo- cation, mais alors le Balkan le ramène sur la voie orientale. Après une si longue route, après tant de tourments et d'er- reurs qui font ressembler son cours à une longue vie d'homme, il arrive à son but, tournanl les difficullés, Iriomphant des obstaclesipard'habiles manœuvres, faisant son chemin laborieux sur la terre, il arrive enfin, car c'est Dieu qui le mène, et se jette triomphalement dans la Mer Noire par cinq embouchures ! Dans ce magnifique parcours, il fait, en moyenne, 7 kilomè- tres par heure, traversant plus de provinces, de duchés, de principautés et de royaumes, arrosant,^ivi(ianl plus de ter- res, touchant à plus de villes que je ne pourrais le dire sans entrer dans une immense nomenclature géographique. Si on excepte l'époque où la Dncic Trajane fut incorporée