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296 VOYAGE A VIENNE. très curieuses, très remarquables, sans doute, mais quel- quefois bizarres, quelquefois puériles, et vers lesquelles il semble que son esprit positif et rectiligne ne devait pas avoir de pente. Napoléon , ses généraux et ses armées n'ont guère envisagé l'Autriche qu'au point de vue des opérations militaires. Nous allions si vite en victoires, que nous n'avions pas le temps d'observer et d'écrire. C'était assez de tracer un bulletin, au feu du bivouac, le soir de la bataille. Depuis la longue paix européenne , nous avons peu songé à ce peuple qui, de son côté, ne songe pas beaucoup à nous. Cependant, dans les salons, on parle volontiers, à Vienne , notre langue aux étrangers, cette langue qui nous fait par- tout une patrie en terre civilisée. Nous avons encore conservé là cet ascendant incontesté de la mode française : toute haute élégance vient de Paris. Aussitôt que je descendais de mon logement (hôtel du prince Charles), c'était l'adresse du coif- feur, du bottier, du tailleur français qu'on me mettait d'abord sous les yeux. Ailleurs Victorine faisait savoir aux Viennois, et surtout aux Viennoises, qu'elle arrivait de Paris avec un nouvel assortiment tout frais de modes de distinction. Victo- rine faisait le chapeau ; Victorine faisait la robe ; Victorine faisait le corset... et que ne faisait pas Victorine ! Cela me rappelle qu'ayant séjourné quelque peu à Edin- bourg, j'y rencontrais partout deux choses, alors nouvelles et récemment venues de France : les Mystères de Paris et la Polka ! La Polka surtout excitait une ardente rivalité parmi les marchands de musique. Chacun d'eux se croyait obligé de prévenir le public qu'il courait dans le monde beaucoup de Polka douteuses et frelatées, dont les gens de goût devaient se garder ; mais, par la même occasion , tout marchand de musique se félicitait de pouvoir offrir au public éclairé la