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356 LETTRES SUR LA SARDAIGNE. fière pour cela , ni plus savante. Après avoir traversé la cour de cette académie , dont les pavés disjoints laissent passer une herbe accusatrice , nous entrâmes dans le Mu- séum. Je saluai, en passant, une foule alignée de peaux de lièvres, de lapins, de chats, de chiens, de panthères etc., rembourées de foin et de filasse, et connues généralement dans les cabinets d'histoire naturelle sous le nom d'ani- maux empaillés. De là , nous entrâmes dans le cabinet des antiques; monsieur le baron me fil remarquer une riche collection de vases, d'urnes el autres pots cassés. Ensuite avec une admiration pleine de recueillement, il me plaça devant une série d'affreuses petites idoles phéniciennes, que, dans mon ignorance, je pris pour des araignées en terre cuite, et devant un assortiment de pierres mystérieuses, cou- vertes de signes hiéroglyphiques plus mystérieux encore; s'il fant en croire les savants, ces petites idoles phéniciennes se- raient ce que la Sardaigne renferme de plus précieux. Mon- sieur de la Marmora, l'autorité scientifique la plus incontes- table de l'Italie, en a publié une reproduction exacte dans son magnifique ouvrage sur les antiquités sardes. Quant aux pierres symboliques, leur importance est telle qu'elles pour- raient mettre, sur la voie des plus grandes découvertes, ces hommes profonds, qui consacrent beaucoup de jours de leur vie et beaucoup d'in-octavo à nous apprendre que le grand roi Salomon prenait des glaces à la vanille et des sorbets au marasquin; que la reine Cléopâtre, pour séduire Octave, frottait ses talons de rouge, el que Sésostris péchait à la ligne. En quittant le Musée, nous descendîmes une petite rue rapide qui nous conduisit à la tour de l'éléphant; cette tour, dont la construction remonte à l'époque de la domination pisane, en Sardaigne, n'est autre chose qu'un immense dé de pierres, doré et culotté comme un grand morceau d'am-