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VOYAGE A VIENNE. 141 Non, jamais dans toute sa gloire, dans toute sa puissance, pas même le jour où il prit à l'Empereur François sa capitale et sa Bile, l'Empereur Napoléon ne parut si grand ! Il s'é- chappait à peine de son exil, sans soldats, sans argent, sans couronne, un autre occupant ce siège de bois recouvert de ve- lours qu'on appelle le trône, et, à peine se montrait-il dans un lointain de 400 lieues, que tous ces vainqueurs couronnés, à la tôte d'un million de soldats, tremblaient et se serraient à la seule pensée de cet homme rendu à la liberté et à la guerre. Ce fut un êpouvantement immense ! De toutes les bouches royales partit à la fois ce terrible cri : aux armes ! cri d'effroi autant que de vengeance. Et il sefitd'abord un grand mouvement et puis un grand silence à Vienne. On ne dansait plus ; les chants avaient cessé; pas un empereur, pas un roi, pas un duc plus ou moins ré- gnant, pas le moindre principicule n'était resté; on sentait bien qu'on aurait besoin de tout le monde, et ce n'était pas trop ! Vous n'auriez pas ramassé un margrave dans celte capitale éveillée en sursaut et si profondément troublée par l'ombre menaçante. Ces vainqueurs tremblants étaient partis. Ils avaient pour eux le nombre, le courage de la peur et cette force que fait l'union : ils eurent aussi la fortune. Bientôt la fumée de la poudre se dissipa de nouveau. Le conquérant avait dit le dernier mot que Dieu lui eut donné à dire. Les souverains alliés purent reprendre l'œuvre de pacifica- tion et le bal interrompu. AIMÉ ROYET. [La suite prochainement).