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 du nonce Frangipani, que j'ai honte de rapporter, de peur d'avoir l'air de
le prendre à mon compte, le reproche si injustifié pour notre bonne ville
d'être, au confluent d'humidité de deux fleuves, le séjour d'élection des
« catarrhes ». Il déniait tout sens artistique à Matthieu et à ses collabora-
teurs. Il se moquait des dames, qui, suivant le canon de la mode, s'amin-
cissaient la taille et de là jusqu'aux pieds arrondissaient leurs jupes en
 des cerceaux toujours plus larges. Il appréciait peu la musique du Roi,
bonne tout au plus pour des concerts de chambre, et encore moins la chère,
qui n'était ni délicate ni choisie. La seule maison où l'on mangea bien
et but des vins exquis, c'était celle du grand banquier florentin Bonvisi,
le meilleur des amphytrions, dirions-nous, un « Apollon », proclame le
majordome ému.
      Pauvre pays que le nôtre ! L'abbaye d'Ainay, qu'on avait réservée au
Légat et à sa suite, était si démeublée ou si insuffisamment meublée qu'Aguc-
chi dut recourir aux bons offices coûteux des marchands. Il faut qu'il ait
crié bien haut sa mauvaise humeur et son dédain pour que le grand aumô-
nier, quelques vingt ans après, réplique en ses mémoires : « M. le légat et
ses officiers, qui nous avoyent bravés en meubles et ornemens d'église à
Chambéry virent audict lieu (Lyon) la grandeur et l'opulence de la France
par la grande quantité de riches meubles desquels toute l'église de Saint-
Jehan, le logis du Roy et de la Reyne et celuy dudit sieur légat furent
meublés et accommodés très magnifiquement, car tout ce qui avoit esté
faict à Marseille pour la réception de la Reyne avoit été rapporté à Lyon ».
Mais, en attendant l'arrivée du convoi, Aldobrandini était descendu chez
Apollon.
      L'entourage de Marie de Médicis ne cessait de gémir et de quéman-
der. Vinta déclarait indispensable à la santé de la souveraine de garder
ses cuisiniers italiens. Sous prétexte qu'elle était « bonne ménagère », — une
qualité qui égaya fort Henri IV, — il demandait de créer un contrôleur
des finances de la Reine, payé sur les deniers publics, et qui ne pouvait
être qu'un de ses parents, on le devine. Il réclamait pour Leonora Galigaï
la charge de dame d'atour qui, à la Cour de France, ne se donnait qu'à une
dame noble, et il insista si fort que le Roi, sachant la raison de son impor-
tunité, céda pour faire plaisir à la Reine.