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       Marie de Médicis avait pour sa camérière — la seule personne qui
 eût touché à ses cheveux et à sa toilette intime — une affection qui allait
 jusqu'à la faiblesse. Aussi un jeune gentilhomme florentin, Concini, qui
 s'était fait attacher à sa suite pour servir le Roi son mari partout, « même à la
 guerre », trouva moins pénible et plus lucratif de faire la cour à la femme
 de chambre et de s'assurer en l'épousant la faveur de la maîtresse. Les in-
trigues et les prétentions de tous ces Italiens contribuèrent à enveni-
 mer les rapports, qui s'annonçaient difficiles, du couple royal.
       Après les fêtes de la Noël, les négociations avec les représentants du
 duc de Savoie reprirent sous la médiation d'Aldobrandini et finirent par
 aboutir à un traité (Lyon, 17 janvier 1601), qui laissait le marquisat de
 Saluées à Charles-Emmanuel, moyennant la cession à la France de la
 Bresse, du Bugey et du Valromey. Le Roi avait eu en ces jours de succès
 diplomatique la presque certitude de la grossesse de Marie de Médicis.
 Et alors, dit le grand aumônier, estimant « avoir pour ceste première
foys assez donné de satisfaction et asseurance de son amitié conjugale à
la Reyne », il partit le 21 janvier pour rejoindre la marquise de Verneuil,
avec qui il n'avait pas cessé d'être en rapport de « lettres et de compli-
ments », tant il était « coiffé et amoureux de laditte marquise ».
      Henri IV ne se croyait pas un mauvais mari. Quand il écrivait à Marie
de Médicis après les épousailles de Florence : « Aimez-moi bien et ce
faisant vous serez la plus heureuse femme qui soit sous le ciel », il était
sincère, car il voulait dire : Aimez-moi assez pour me passer toutes les
escapades et je vous serai bon compagnon. Mais les souveraines n'ont
pas toutes cette vertu de renoncement. Marie de Médicis pouvait s'at-
tendre à fixer un mari qui touchait à la cinquantaine. Mais le Vert galant
ne se résignait pas d'être, si je puis dire, l'homme d'un seul livre. Un des
propos de Charles-Emmanuel, qui l'avait aussi vivement piqué que le
manque de parole, c'était une moquerie sur son âge et ses amours. Eh
bien ! aurait-il dit, à Chambéry, aux ambassadeurs du Duc, venus pour
solliciter la paix, le voici ce vieillard affaibli par l'âge et les plaisirs.
      Il aurait dû consacrer les restes de cette belle ardeur à conquérir sa
jeune femme, mais il ne l'a pas voulu. Il n'a pas pris le temps de persua-
der à la Reine de France d'oublier la princesse de Toscane ; il avait l'esprit