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est naturel, qu'il était surpris que je n'eusse point été informé de cela, qu'il
avait toujours cru que cette convocation se faisait de concert, qu'il était
étonné que M. le Procurer général ne m'en eût pas parlé, et qu'il croyait
que c'était M. Desforges ou M. le Procureur général qui l'avait fait,
(cette incertitude sur celui qui avait fait la lettre circulaire me parut affec-
tée). Il a laissé mon mémoire sur la table. Je l'ai prié de le mettre dans sa
poche. « Que voulez-vous que j'en fasse ? Il faudrait y répondre, et ce
« serait verbaliser entre nous ; ma maison est encore en confusion, je
« n'ai pas seulement commencé de journal, je ne sais comment je vis ».
      « Sur quoi, notre conversation ayant fini avec l'air d'une confiance
réciproque, il est sorti, pour s'aller promener » \
      Mais la « confiance réciproque » ne dure pas longtemps. Les diffi-
cultés se renouvellent entre le commandant et l'intendant au sujet de la
prise de possession du Port et de l'Hôpital, opérations dans lesquelles
Poivre est soupçonné par son adversaire de vouloir favoriser la Compa-
gnie des Indes, au sujet de la tenue du journal commun d'administration,
du contrôle de la Caisse de la colonie. Dumas persuadé que toutes les ma-
nœuvres de Poivre procèdent d'une intrigue longuement mûrie, de ce
complot ourdi par des gens qui cherchent à ramener les Mascareignes
sous la tutelle de la Compagnie, finit par réclamer purement et simple-
ment le rappel de l'intendant, en conclusion d'une longue dépêche où il
énumère tous ses griefs et retrace la genèse du fameux complot. « J'ose
vous demander le rappel de M. Poivre et je vous prie d'observer que je
ne puis avoir à cela d'autre intérêt que celui du bien du service ; vous
enverrez toujours ici un autre homme à sa place ; je n'ai rien à gagner ni
en puissance, ni en autorité ; les intérêts de M. Poivre et les miens com-
parés sont ici un puissant argument »2.
      Le « rappel de M. Poivre » va désormais figurer souvent dans la cor-
respondance de Dumas. C'est son delenda Carthago. Il regrettera même
de ne pas l'avoir embarqué d'office pour la France afin de sauvegarder
les intérêts du Roi.

   i. Journal de M. Dumas, 26 juillet 1767 ; Dépêches de M. Dumas, 8 novembre 1767.
   2. Dépêches de M. Dumas, 8 novembre 1767.