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262 BERNARD SALOMON décoration du livre, qui a fait cette décoration la plus attrayante, qui, d'accord avec celui qui a dû être de moitié dans la transformation du livre, se laissait emporter par un mouvement quelquefois désordonné. Il a réagi pour cela contre la tradition ; il a abandonné les ornementations qu'on peut appeler archaïques ou gothi- ques, il a écarté les formes flamandes et allemandes, repoussé tout ce qui rétrécissait la scène et alour- dissait les personnages. C'est pourquoi rompant avec la tradition germanique, il a puisé si largement dans l'oeuvre primaticienne et s'est même trop plu à cette étude. Le succès a favorisé son entreprise; le succès l'a grisé et nous lui trouvons les faiblesses et les défauts de ses inspirateurs. Bernard Salomon s'est séparé de plus en plus de l'école parisienne, il s'est trop italianisé. Il n'est plus revenu au sens de l'art français, de cet art qui est fait d'exactitude, de raison, de sagacité et de finesse, qui a gardé quelque peu de l'empreinte flamande ; il a conservé sans doute le sentiment de la distinction, mais il n'a pas pu se déshabituer, même au détriment de la mesure, de trop ajouter à l'élégance et à la grâce. Il n'a plus ressaisi son indépendance, emporté par le vif mouvement dont il avait pris l'initiative. Pendant les dix années où il fut le plus en renom, nous ne le retrouvons plus comme au temps de ses plus heureuses créations, aussi simple, sobre, français, que dans les petits tableaux des Marguerites. Ses figures sont restées déme- surément sveltes et ses imitations n'ont pas été toujours discrètes. Il a perdu de sa valeur comme artiste. Il n'a rien perdu, toutefois, de l'originalité qu'il avait acquise et