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4O4 HENRI H1GNARD combien j'ai à faire!... il faudrait ici pour bien rendre ma pensée, vingt points d'admiration, et deux ou trois lignes de petits points ; mais le papier est rare, et je veux en profiter. Mon ami, de demain en huit, le 22, ce redoutable 22, pendant trois jours, il faudra concourir avec des hommes de 30 ans, et deux jours après, soutenir un terrible examen devant toute la Faculté des lettres, tout ce qu'il y a de célèbre dans l'Université. M. Cousin, M. Jouffroy, l'auteur du Droit naturel ; M. Victor Leclerc, le doyen; Saint-Marc Girardin, Patin, Guigniaut, Damiron, tous professeurs à la Sorbonne, presque tous membres de l'Institut. Heureuse- ment que M. Villemain est ministre, sans quoi il viendrait aussi nous tourmenter ; enfin c'est à se désespérer. Quand je vois tout ce qu'il y aurait à faire pour être bien préparé je suis tenté d'aller me cacher dans un petit coin sombre avec mon noir chagrin comme le dit le misantrophe. Bah ! il faut être plus confiant ; d'ailleurs je suis presque certain de n'être pas reçu, on ne l'est ordinairement qu'au deuxième ou au troisième examen, surtout à Paris où c'est bien plus difficile qu'en province. Du reste,le travail que je fais maintenant ne sera pas perdu, car il me servira pour l'année prochaine. Mon cher ami, j'ai passé dimanche dernier une journée délicieuse, que je vais te raconter. J'ai déjeuné chez mon oncle à 10 heures, puis nous sommes partis, mon oncle, ma cousine et moi ; nous avons été prendre le chemin de fer de Saint-Germain, Si tu voyais comme ce chemin de fer est plus beau que celui de Lyon ! Les machines à vapeur qui mènent les convois sont de toute beauté, mais ce qui est triste, c'est qu'elles viennent toutes d'Angleterre ou de Hollande. Elles mènent de Paris à Saint-Germain, et ces cinq lieues se font en une demi-heure, c'est-à -dire une lieue pour six minutes, et dans