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EN TOSCANE ET EN OMBRIE 213 bruyant cantique, mais sous l'immensité des voûtes il sem- blait si lointain qu'il s'épandait auguste et religieux comme un hymne digne de l'humanité consolée. Nous nous sentions très loin, un peu perdu sur ce roc d'Orvieto, dont l'hôtel, ancien palais aux immenses salles lambrissées avec allégories Louis XIV ; dans les ruelles où quelques femmes enroulées de rouge passent rapidement, le scaldino plein de cendres chaudes aux mains, le froid est cinglant, le temps très clair, le soleil disparaît derrière les sommets bleus. De la forteresse construite par le grand car- dinal Albomoz (1364), devenue un paisible jardinet, le panorama est étonnant, dans la vallée, très en bas, la Chiana se traîne entre les collines encore rouges et vertes, par une vieille porte papale les paysans s'en vont du marché à travers les oliveraies, derrière eux les chars à bœufs aux longues cornes et les ânes nombreux déjà comme en Orient dégringolant la pente pavée avec leur joli bruit de fers, quelques signori bien en selle galopent au loin sur des petits chevaux ombriens, le paysage délicieusement nuancé par ce soleil hivernal qui disparaît, s'assoupit dans les brumes du soir; quelques reflets encore aux émaux du Dôme, Orvieto semble abandonné, lentement par la voie musique vocale, instrumentale, même dans les grandes cathédrales de la patrie de Palestrina rappelle actuellement tantôt un final d'opérette, tantôt les modes exquis de la polka ou du galop ! Je me demande comment certains évêques réputés pour leur prédi- lection artistique, permettent encore aux organistes de jouer des marches de féeries ou d'organiser des messes indignes de ce nom ? Les Italiens devraient bien envoyer leurs maîtres de chapelle à Vienne, à Munich ou à Dresde, retrouver les traditions de Palestrina, de Caris- simi, de Scarlatti, etc.