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                   NOTES D'UN PROVINCIAL                    375

 Louis XV, et l'étrangeté délicieuse et légère de la jeune
 fille aux draperies japonaises. Hormis ces portraits et quel-
ques autres peut-être, je ne vois plus à signaler un peu
hautement, parmi les vivants, que M. Roll. Encore cet
 artiste ne me paraît-il pas en progrès depuis sa dramatique
Inondation de Toulouse, qui date de douze ans. Il y a dans
cette grande toile des incorrections et du tapage (M. Roll
 est de Toulouse), mais l'inspiration en est franche, et
l'émotion du peintre, évidemment sincère, y est exprimée
avec une éloquence qui la rend contagieuse. Il semble que,
depuis, les lauriers de Bastien-Lepage ont troublé le sommeil
de l'auteur ; mal conseillé par la critique, il a versé, lui aussi,
sous prétexte de pleinairisme, dans les feuillages paradoxaux
et dans les verdures confuses et délayées. Même son Etude
{Femme et Taureau), qui a été l'une des maîtresses-œuvres
du Salon de 1885, est une peinture mince, au regard de
l'Inondation. L'Inondation occupait d'ailleurs une place d'hon-
neur à l'Exposition ; elle figurait sous le dôme, et j'en ai
conclu que mon sentiment avait été celui des organi-
sateurs.
    Qu'ai-je vu encore? J'ai vu les fameux tableaux de
M. Munckaczy, le Christ devant Pilalest le Golgotha, qui ne
m'ont point paru, à beaucoup près, justifier l'engouement
dont ils ont été et dont ils sont encore l'objet. Il m'a été
impossible de ne pas demeurer froid en face du Christ devant
T'Hâte, mais froid à m'en étonner moi-même. Ce Christ n'a
d'abord rien de divin. A côté de moi, de braves gens du
peuple ne le reconnaissaient pas, et ils avaient raison, car le
dédain irrité du personnage de M. Munckaczy est préci-
sément le contraire des sentiments que Jésus-Christ a
témoignés à son juge. Une telle inexactitude est sans doute
la première raison pour laquelle cette grande page si tra-