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CHARLES MOREL, SCULPTEUR LYONNAIS 75 Qu'est-ce que Jacques Môrel ? Certains artistes sont des maîtres, mais Jacques Morel est un très grand maître. On est encore loin de le bien connaître. Il est l'homme d'un passé que les érudits cherchent à scruter en étudiant les textes et les monuments. Chaque jour de nouveaux faits demeurent acquis à la science; d'autres nous échappent et seront la conquête de demain. Deux choses importent chez les maîtres : leur personne et leur œuvre. La personne de Morel se dégage désormais dans une suffisante lumière. On avait cru à l'origine languedocienne de l'artiste. C'était une erreur. Morel est Lyonnais. M. Rondot l'a prouvé. Ce n'est qu'accidentellement que le maître a fait un séjour dans la ville de Montpellier. Né à Lyon, Morel y demeure, il y travaille, il y fait probablement école, et plus tard il s'en va mourir à Angers, en 1459, au service du roi René, après avoir été aux ordres du chapitre de l'église prima- tiale de Lyon, du duc de Bourbon et peut-être du roi de France. Voilà pour l'homme ; parlons de l'œuvre. On a dit de Jacques Morel qu'il était Bourguignon de doctrine. Sur ce point, il faut s'entendre. A l'époque où travaille Morel, l'art flamand a pénétré sur la terre de France, et la Bourgogne est, pour ainsi parler, le quartier général des tailleurs d'images les plus célèbres. Cette situa- tion est ancienne. Après la disparition de notre école nationale de sculpture, qui est dans sa splendeur au douzième et au treizième siècle, les rois de France avaient demandé aux Flamands d'être des éducateurs pour nos artistes. Beauneveu appelé par le monarque, Marville et surtout Claux Sluter, sculpteurs du duc de Bourgogne, avec des tempé- raments divers, firent accepter par nos imagiers les ten- dances, l'esprit, le style flamands. Cette révolution fut