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438          UNE SOIRÉE DANS L'AUTRE MONDE

et prouver le pouvoir de leur fondateur. Grâce à notre ami
Si-Hamou, nous pûmes y assister dans des conditions toutes
spéciales et nous assurer que nul charlatanisme ne peut en
donner l'explication.
    Il faut remarquer, pourtant, que souvent il n'en est pas
de même; à Alger surtout, les Aïssaouas sont plutôt des
saltimbanques se donnant en spectacle, méprisés des Arabes,
et annonçant leurs réunions par des affiches, en somme,
cherchant à spéculer sur la curiosité du public. Leurs core-
ligionnaires de Constantine, de Laghouat et du Maroc, au
contraire, se renferment avec un soin jaloux dans leurs
mosquées, où il est fort difficile à un Européen d'être admis.
Je ne sais comment Si-Hamou parvint à organiser en notre
 faveur l'étonnante cérémonie dont nous fûmes témoins.
     Il est surprenant que dans presque tous les pays orien-
taux, on retrouve des sectes religieuses adonnées aux
 cruelles pratiques des Aïssaouas et presque avec les mêmes
 rites. Les Fakirs de l'Inde, les Illuminés de la Perse et du
 Turkestan s'imposent les mêmes tortures volontaires. Le
 Père Hue, dans son intéressant voyage en Tartarie, raconte
 que, dans une lamaserie du pays des Ortous, à Rache-
 Tchurin, les lamas, à certaines fêtes, lèchent impunément
 des fers rougis et se font sur le corps de profondes inci-
 sions. Ces horribles blessures se guérissent instantanément.
 Comme les Aïssaouas, ils se surexcitent par des chants, des
 cris et des hurlements.
      Le Père Hue ne peut s'empêcher de donner une cause
  surnaturelle à ces prodiges, qu'il avoue n'avoir pas vus,
  mais que personne n; met en doute dans le pays.
  Quelques jours après avoir vu les exercices des Aïssaouas,
  j'eus l'occasion d'en parler à Mgr Lavigerie, que j'eus
  l'honneur de voir à Biskra. Ce grand Français, qui fait