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DE LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES LYONNAIS 223 A Lyon, autant qu'en aucun lieu, cet affaiblissement des moeurs se fit sentir, aggravé qu'il devait être par l'affluence des richesses et des produits du monde entier qui s'y importaient. Pendant près d'un siècle un double courant, venant de points opposés, mit en contact dans nos murs deux civilisations dissemblables, mais également arrivées au dernier degré de leur développement. L'une, avec la Cour de France, à qui la politique avait fait de Lyon une capitale transitoire, l'une brillante de jeunesse, de force et de vigueur; l'autre venue de Gênes, de Milan, de Florence et pétrie de tous les raffinements, de toutes les énervantes ivresses nées sous le doux ciel d'Italie. Les poètes, les chroniqueurs et jusqu'aux médecins écri- vains, nous ont transmis des traits qui font connaître le trouble et le relâchement des mœurs dans notre ville. Un seul mot, un dicton qui courait alors, suffit pour dépeindre cette situation : Lyon était pour la France la ville de Vénus. Il n'est pas, dès lors, besoin d'insister pour faire admettre que, dans une pareille cité, un monastère, riche de terres et de revenus, peuplé de jeunes femmes appartenant toutes aux familles aristocratiques, il n'est pas besoin d'insister pour faire admettre que le désordre y ait pénétré. La mer- veilleuse histoire se rattache à ce fait. L'abbaye de Saint- Pierre était tombée dans un complet désordre; l'autorité ecclésiastique n'avait pu y rétablir l'observation de la règle, et l'abbesse, elle-même, donnant l'exemple de l'indisci- pline, avait résisté formellement à l'archevêque. Or. dut prendre des mesures décisives et mettre les religieuses en demeure ou de se conformer à la règle ou de quitter le monastère. Dans cette alternative, elles optèrent pour le dernier parti ; mais, sans attendre d'être mises dehors, elles sor-