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     LES ALIÉNÉS DEVANT L'OPINION ET DEVANT LA LOI         I9I

d'années dirigent l'opinion. A cette époque, en effet, les
passions politiques ont cru pouvoir exploiter ces préjugés
entretenus par une ignorance à peu près complète, dans le
public, des phénomènes de l'aliénation et de tout ce qui
s'y rattache. Ces idées ont fait leur chemin et se sont
répandues au moyen des soi-disant révélations de la Presse
intéressée à faire naître des scandales ou simplement à
exciter l'émotion dans un but de réclame et de spécula-
tion. Quelques faits délictueux et même criminels, surve-
nus fort à propos et présentés avec une bonne foi douteuse,
ont contribué à accréditer ces accusations et à passionner
les esprits.
   Quoi qu'il en soit, les questions relatives à l'aliénation
sont entrées dans le domaine public, sont devenues des
sujets de discussions quotidiennes, bien qu'elles soient
peu connues de ceux qui les abordent. Au point de vue
criminel, administratif ou social, on apprécie et on com-
mente les faits qui s'y rapportent, les lois et les règle-
ments dont elles sont l'objet; on résout les problèmes les
plus difficiles et les plus ardus avec une assurance et une
décision que n'oseraient montrer les praticiens les plus
versés dans cette branche des sciences médicales et philo-
sophiques. Il semble que l'aptitude et la compétence à con-
naître de ces choses grandissent et s'élèvent en proportion
inverse des notions que l'on en possède.
   Cette présomption fort étrange, sans doute, se rencontre
aujourd'hui à tous les pas quand il s'agit des connaissances
scientifiques. C'est une faiblesse et une tendance de l'esprit
humain, qui ne sont pas nouvelles mais plus développées
encore à notre époque, par suite de l'extension et de la dif-
fusion plus grandes de l'instruction, dont le résultat consiste
trop souvent à former des demi-savants.