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SORTIE DES LYONNAIS. 291 nos gîtes de distance en distance. Je me rendis à ce projet ; nous convînmes que, la nuit suivante, je partirais avecIVÃ... le jeune, pour aller rejoindre son frère qui m'avait quitté depuis quelques jours pour se réfugier dans un de ses domaines nommé Saint-Farg, près Tarrare, et sur la roule que nous devions prendre. D'après nos arrangements je me mis en marche la nuit suivante, non sans faire de bien tristes adieux à mon respec- table hôte et à tous mes bons amis. J'arrivai à Saint-Farg à trois heures du matin, j'y trouvai M... l'aîné. Celui qui m'avait accompagné continua sa route pour Lyon où il avait dessein d'aller. Je passais six jours dans ce domaine ; le jour je me cachais dans la paille, et la nuit je me couchais avec M... dans le lit du valet d'écurie, au milieu du cercle nombreux d'animaux de toute espèce ; il y avait une cachette très à portée de notre lit, dans laquelle nous pouvions très-facilement nous jetter au moindre bruit. Le fermier du domaine n'avait de révolu- tionnaire que sa conduite irréligieuse; tous ses sentiments, du reste, étaient d'un bon royaliste. Ce canton était très- dangereux à habiter, on y faisait de fréquentes visites et sou- vent des réquisitions de grains. Nous fumes forcés, un jour, d'aller nous cacher dans un bois, où nous fûmes découverts par un homme qui nous suivit dans je ne sais quelle intention. Cet accident nous alarma et nous partîmes la nuit suivante pour retourner à Sainte-A... Nous y arrivâmes sur les cinq heures du matin, nous nous retirâmes sur le champ dans notre cachette,et,à huit heures,j'allai trouver mon hôte; je vis le Char- treux qui me dit qu'il avait reçu une lettre de son ami, qui lui ôtait toute espérance de sortir du royaume, comme nous l'avions projette. Je demeurai quelques jours tranquille, mais cette tranquillité fut troublée par l'avis que je reçus, que des commissaires du comité de surveillance de Néronde devaient