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398                LES FEMMES MARSEILLAISES.
raient leur pudicité, si mieux il n'aimait leur permettre de se
 défendre avec la dague et le coutelas à la main (1). »
    Tant de vertus unies à tant de beauté frappèrent d'admira-
tion le roi Alphonse. Apparemment les dames arragonaises
n'avaient pas habitué ce prince à de si robustes vertus con-
jugales. Toujours est-il qu'il s'empressa d'accorder aux ra-
vissantes parlementaires ce qu'elles demandaient. A propos de
quoi les historiens, qui ont quelquefois des naïvetés, ajoutent :
« qu'Alphonse, après s'être rapproché des dames marseillaises,
s'abstint de toucher à rien des précieux objets qu'elles portaient
avec elles. »
   Plus tard, en 1516, François 1 er , le roi chevaleresque, s'étant
arrêté à Marseille et désirant beaucoup de plaire aux dames de
cette ville, imagina, en leur honneur, une fête tout-â-fait galante :
un combat naval fut livré dans le port. Les orangers des jardins
d'Hyères avaient fourni les projectiles employés dans cette
guerre digne du royaume de Tendre. Le roi, très-galamment
habillé, assiégeant en personne les fenêtres et les balcons où se
tenaient les dames, faisait pleuvoir sur elles une grêle de beaux
 fruits parfumés. On dit que, parmi ces bombes amoureuses, il
 y en avait beaucoup qui contenaient de tendres billets à l'adresse
 des plus belles Marseillaises. Et chose bien digne de remarque :
 à toutes ces tendres demandes du roi chevalier, il n'y eut pas
 une seule réponse!
    Les femmes de la cour de François 1 er n'en voulaient rien
 croire. Boccace et Lafontaine en eussent douté, moi je n'en
 doute pas.
    Plus tard encore, en 1660, Louis XIV était entré, comme
vous le savez, dans la ville de Marseille, entouré de tous les
 prestiges de la grandeur et précédé d'une réputation de galanterie
 pas mal entreprenante. Pouvait-il en être autrement? Le roi
 était à peine adolescent que déjà on le traitait comme un sultan
 de Misore. On lui avait fait une cour d'odalisques. Les femmes
 élégantes, spirituelles, aimantes, romanesques s'offraient de

  (i) Voir Ruffi et les autres historiens de Marseille.