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170 ROME AD SIÈCLE D'AUGUSTE. obtenir des courtisans ou pour faire briller devant leurs pas la hache des licteurs! 11 est vrai que toutes ces caresses étaient une feinte, et César se répétait sans doute les paroles que le frère de Cicéron, Quintus, admirait daus la bouche de Cotta, cet habile maître dans l'art de la brigue : Quand je suis candidat, disait-il, je promets à tout le monde, et je m'ac- quitte ensuite avec ceux dont la reconnaissance me paraît le plus avantageuse (1). Mais feindre ainsi n'est-ce pas s'avilir, et promettre delà sorte n'est-ce pas trafiquer? Cependant une dépense réelle était faite par les compéti- teurs, et cette dépense était énorme. Il fallait plusieurs millions pour défrayer l'élection romaine. Une somptueuse libéralité, la représentation la plus ruineuse, des jeux su- perbes, des festins publics signalaient un consulaire, souvent deux années à l'avance (2). Au jour même des voles, dix ou douze millions de sesterces étaient comptés à la foule (3) au nom du candidat, par des gens qui étaient chargés dans chaque tribu de classer le peuple, suivant la division indiquée par le genre des comices, et qui profitaient de leurs fonctions pour se faire les agents des candidats les plus généreux, et les distributeurs de leurs largesses. On les nommait divisores, pour cette affaire. Ne vous semble-t-il pas que nos élections les plus onéreuses soient à vil prix en comparaison de celles-là ? Rassurez-vous donc, et consolez-vous de n'avoir pas vécu à Rome, consolez-vous, hommes d'intrigues, ambitieux, ou déprédateurs, vous tous qui, au lieu de suivre énergiquemenl, l'esprit de nos lois et de notre constitution, au lieu de porter en avant un drapeau fièrement déployé dont les couleurs puissent provoquer notre libre sympathie ou attirer nos r é - pulsions spontanées, aimez mieux descendre dans la fange où se tiennent les enchères politiques, et briser sous les coups d'une ignoble connivence celte glorieuse urne électorale d'où la révolution française avait fait jaillir notre commun affran- chissement; rassurez-vous : César paya son élection au con- sulat plusieurs millions de notre monnaie. Vous devez vous féliciter de votre bonheur; les candidatures politiques sont devenues une économie relative, et tout en ménageant vos largesses, il vous est loisible encore de proclamer, à l'hon- neur du XIX e siècle, votre admiration pour la doctrine de la perfectibilité indéfinie! (r) Q. Cic. De petit, Consulat, xu, -(2) X. 11. p. 2, — (3) T. n, p. I I - I 3 .