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   avec indifférence les commeiicemens, et négligea d'éteindre ce feu qui dans la
   suite forma un incendie dans lequel il fut lui-même enveloppé avec tout le royaume.
   L'archevêque qui avait sucé avec le lait un penchant naturel et un attachement
   à la maison des Guise, n'eut pas de peine à entrer dans leurs vues, et son incli-
   nation se fortifiant à mesure qu'il concevait de l'aversion pour le favori, il ne
   dissimula plus, et entra par là si avant dans la confidence des Guise qu'ils ne
  firent rien d'important qu'ils n'eussent pris son avis. Le roi qui s'aperçut de ce
   changement, ne laissa pas de le traiter comme à l'ordinaire, et dans les voyages
  qu'il fit à Lyon après ces brouilleries, il accepta les régals que ce prélat lui donna
  avec le même visage qu'auparavant ; ce prince jugeant devoir ménager cet
  esprit bouillant et impétueux, capable de se porter à quelque extrémité, et
  croyant le ramener par la douceur et le réconcilier avec son favori. La coui" lui
- témoigna même tant de confiance que la reine-mère le prit pour son conseil au
  voyage qu'elle fit àNérac pour conférer avec le roi de Navarre, et le roi, peu de
  temps après, envoyant ses serviteurs les plus affidés dans les provinces du royaume
  pour disposer les peuples à le secourir dans les affaires urgentes de l'état, la
  Normandie et la Bretagne lui étant échues, il y alla et présida aux états qui
  furent assemblés à ce sujet, mais avec un succès peu conforme à ce qu'on en
  avait espéré.
     L'année 1585 fut remarquable par les progrès rapides que fit la Ligue par tout
 le royaume ; elle parut alors à visage découvert : ses partisans se saisirent d'autant
 de villes qu'il leur fut possible dans les provinces de Picardie et de Champagne.
 Le roi, qui ne voulait point de guerres, au lieu de monter à cheval pour aller
 remettre ces révoltés dans le devoir, mit cette affaire en négociation, et leur fit
 des propositions de paix qui furen t conclues à Nemours, où l'archevêque se trouva
 et eut grande part comme partout. La bonté du roi fut si grande envers lui, qu'a-
 près avoir porté (sic) les intérêts de ses ennemis avec chaleur, et s'être brouillé de
 nouveau avec le favori à cette occasion, il ne laissa pas de lui accorder les abbayes
 du Joug-Dieu en Beaujolais et de la ISenisson-Dieu en Forez , lui ayant donné celle
 d'Ainay l'année précédente. Tant de bienfaits dont ce prince magnifique combla
l'archevêque ne purent gagner son cœur entièrement livré à la maison de Guise :
il semblait au contraire qu'ils ne servaient qu'à l'en durcir ; ce qui est le caractère
 propre de l'ingratitude.
    La Ligue, fortifiée parles avantages qu'elle s'était déjà procurés, se rendit re-
doutable après la victoire que le duc de Guise remporta à Auneau. La défaite
entière des Reistres enfla si fort le courage à ses partisans, qu'ils crurent dès-lors
qu'il n'y avait plus rien qui pût s'opposer à leurs desseins. L'archevêque, entre
autres, qui regardait déjà le duc de Guise comme son monarque, se livra aux
transports que lui causait celte victoire avec si peu de ménagemens, qu'il se ha-
sarda de dire hautement devant une compagnie où était le duc d'Eperno n , qu'il
était au pouvoir du pape de dispenser les sujets d'un prince du serment de fidé-