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DE LA PRIÈRE. 533 colères, il oublie ses peines, il oublie son moi, sa raison s'ou- vre aux réalités qu'il invoque, son orgueil tombe et tout son être s'enlève suspendu à celte aspiration qui l'emporte vers Dieu. Les anges ne peuvent contracter une plus belle forme que celle qu'a prise l'âme humaine en ce moment de la prière ! Si la grâce la surprend à cet instant, elle la fixe plus ou moins dans cet état de perfection, qui insensible- ment lui imprime son caractère et travaille à s'y arrêter pour toujours. C'est une grande avance pour la nature humaine que de faire prier l'enfant chaque jour à son réveil. Toutes les fa- cultés sont encore plongées dans la nutrition du repos, et toutes les forces prêtes à rentrer dans les organes, se pré- cipitent vers celui qui s'anime le premier. La faculté que l'on exerce au réveil devient tôt ou tard prédominante. Dès le malin, l'âme prend donc son impulsion vers Dieu, toutes ses facultés la suivent, les plus hautes parties de notre cœur prélèvent les forces, la lumière se porte sur ces points, et le jour procède de l'aurore, et des hommes deviennent admi- rables et saints (1). Les personnes qui prient beaucoup acquièrent de très pro- fondes vertus. L'âme, durant le cours de la vie, est presque continuellement dans une position gênante, qui fait obstacle à tel ou tel de ses développements. Nos passions, les évé- nements, nos semblables nous arrêtent toujours par quelque côté. Toute la vie esl un frottement plus ou moins doulou- reux. Ainsi, on verrait un homme dont le corps esl replié et emprisonné ; ses membres ne peuvent croître en liberté. Aus- sitôt que commence l'acte de la prière, l'âme se détend, un équilibre superbe s'opère, chaque élément monte à sa place, ( à ) La prière, a dit quelqu'un, esl une vigilance sur nous-mêmes, d'où doit résulter une connaissance plus exacte de nos penchants.