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M. ANGELO FRIGNAN1. 143 dont ils furent battus, et, en nous disant leurs douleurs une à une, bien en détail, ils nous ont remué jusqu'au fond de l'ame et fait pleurer sur leurs plaintives pages. Regrets des ) jeunes années, image de la patrie absente, doux souvenir d'une mère attristée et d'une sœur en deuil, joies partagées avec des amis perdus, sombre pensée de l'avenir, fiévreuse agitation de la nuit et du jour, ennuis dévorants, saintes apparitions de bonheur, chastes et rayonnantes figures de / femmes, fleurs épanouies au soleil d'été, suave aspect de la j nature riante et parée: voilà ce qui tour-à -tour se montre j dans leurs émouvantes peintures, dans leurs vives scènes ' comme dans leurs tableaux attristants. Sans autre horizon que les froides murailles d'un cachot, ils ont su voir mille objets, comme cet ingénieux écrivain qui, dans un voyage autour de sa chambre, a rencontré tant de choses inaperçues et demandé à chacune d'elles une si maligne philosophie. Qui donc ne se souvient de Pellico et de son livre des Pri- sons? Les douleurs de la captivité n'avaient rien inspiré jusque-là de si original, ni de si profondément naturel, et je ne sache pas que, à part Boèce, qui entrevit l'effet que pouvait produire la peinture des souffrances d'un pauvre pri- sonnier, mais qui se renferma dans sa résignation stoïque, aucun homme ait compris ce qu'une pareille situation pré- sente de riches trésors de poésie. S'imaginera-t-on qu'il soit possible, après les Prisons de Pellico, de trouver encore dans un sujet semblable des sour- &> ces d'émotion, et de remuer le cœur avec le récit d'un drame si borné et si simple? C'est là pourtant ce que fit, il y a quelques années, M.JFrjgnani. Jeté dans un cachot et n'ayant devant lui qu'un avenir d'angoisses ou l'aspect de la mort, le noble jeune homme voulut y échapper en simulant la folie, «sr et se mit résolument à jouer un rôle qu'il était malaisé de soutenir jusqu'au bout, par toutes les épreuves qui se pré-