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EXCURSION DANS LE MIDI. 35 Entrez dans la petite cour ; là où vos pieds fouleront à chaque pas un détritus noirâtre et nauséabonde, se trouvent les ruines de l'ancienne église de l'Observance. C'est dans une chapelle de celle église que se célébrèrent, avec un grand faste, les fu- nérailles de pierre Libéria t ( l ) . On vous montrera la place où était cette chapelle. Un jour, l'industriel qui occupe la maison ayant fait des fouilles en cet endroit pour y établir un four, fut fort surpris de trouver, à quelques pieds sous terre, des osse- ments; c'étaient ceux du vîguier marseillais. On rassembla les fragments du tombeau et ce qui restait des os du mort, et l'on porta le tout dans une chambre du p r e - mier étage. Vous y verrez encore des stalues de pleureuses et les débris d'un fronton. La ville de Marseille, de temps en temps, pense à se faire rendre les restes de Liberlat, afin de les placer en un lieu con- venable. Mais le propriétaire actuel de la maison — le fabri- cant de noir animal — met pour condition à cette restitution que la ville lui fasse une concession gratuite d'un denier d'eau, c'est à dire d'un petit cours d'eau venant de l'Huvaune, celle rivière qui roule tant de poussière dans son lit, comme a dit jovialement Méry. La ville hésite; elle trouve cela un peu cher, et, au moment où nous écrivons, la singulière négocia- tion continue. En attendant, voilà qu'une fabrique de noir animal est deve- nue le Panthéon d'un grand h o m m e . Voilà qu'après l'apothéose du viguier, les ossements de l'homme sont jetés pêle-mêle avec des marmites en fonte renfermant des débris d'animaux destinés à faire du noir d'i- voire. Et si les gens de la fabrique allaient se tromper un jour?... s'ils prenaient un débris pour un autre?... 0 vanité, des vani- tés ! Revenons à l'Hôtel de-Ville. (1) Voyez les Corses français, un vol. in-41', Paris, 1667.