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  plicité sans bornes et la vérité sans choix font tomber iné-
  vitablement dans l'ignoble et le commun. Peignez les
 passions, si vous voulez, des couleurs les plus vives et
 les plus saisissantes, en évitant toutefois de faire aux sens
 de coupables provocations, de grossières surprises.
     Pour que notre drame se puisse rendre digne d'une
 faveur que chacun lui tient en réserve, il importe qu'il
 apprécie mieux sa vraie mission, et qu'il s'efforce de plus
 en plus d'améliorer la voie où il n'a fait encore qu'une
 trouée fort imparfaite. La statue est seulement ébauchée,
 il reste à la ciseler et à la polir. Tant que le drame mo-
 derne a eu à lutter, à faire sa brèche, à battre et à vaincre
 le camp ennemi , on comprend qu'il ait donné dans
quelques exagérations inévitables au sein d'une mêlée
pleine de confusion ; on lui pardonne de s'être livré à
quelques violences et à quelques caprices peu légitimes
dans la chaleur du premier entraînement. Il a dû néces-
sairement y avoir dans les débuts impatients du drame
romantique bien du parti pris, bien de l'exclusion systé-
matique et de réaction débordée. Naturellement aussi
celte période effervescente a duré aussi longtemps que le
drame romantique s'est trouvé persécuté ou seulement
assailli de clameurs dans son triomphe. Mais enfin le drame
ayant eu tout loisir et toute trêve pour asseoir son
empire, le moment est venu pour lui de se faire des ré-
solutions graves f de méditer, d'étudier, de comparer,
de choisir, de chercher une issue heureuse à ses décisions
et à ses embarras. Et d'abord, le premier soin du drame,
au lieu d'abolir comme il l'a voulu faire tout notre passé
dramatique , doit être au contraire de s'y appuyer; au lieu
de dédaigner stérilement la forme qu'il remplace, il doit
songer à l'analyser chaque jour pour en extraire ce qui