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                              JEAN T I S S E U R                                           605
grand nombre de mots. Si vous prenez Racine, vous trouverez
que la moyenne de ses alexandrins est environ de sept mots.
J'ai eu la curiosité de compter ceux-ci dans vingt-quatre vers
consécutifs de l'Idole. La moyenne a été de neuf par vers, à peu
près. Le poète les accumule, multipliant les élisions qui enlèvent
une syllabe. On saisit d'ici la différence de marche du vers
ancien et du vers nouveau : l'un solennel, à longs 'plis retombant
avec majesté ; l'autre, rapide et à flots pressés. La multiplicité des
sons, des voyelles, donne au vers de la légèreté, quelque chose
d'ailé. Il remplace ainsi le dactyle antique :
        Que l'air est plein des fleurs qui s'envolent des branches.                .   .

        Qui ressemblent dans l'herbe à des gouttes de lait.            .       .
                              9

        A la main un bâton qui te prête son aide.    .     .

   Lorsque, à cet allegro, succède un andante, le contraste s'accuse
l'un par l'autre :
            Le vent rafraîchissant des humides rameaux.

  C'est ainsi que le Javelot rustique débute par un mouvement
lent, comme celui d'une armée qui s'avance en bataille :
            Dans la plaine, d'abord, on voit les légions
            Commencer lentement leurs évolutions. .            ,

            Les hommes, les chevaux au galop mesuré.               .       .

   Cette expression de galop mesuré, qui semble avoir surgi en
contemplant les chevaux du Parthénon, peint admirablement bien
la régularité du mouvement.
   Mais, dans la mêlée, le vers revient frapper à coups pressés la
mesure :
            A travers les éclats des lances et des chars.          .• .

  J'ai compté aussi les mots dans deux idylles de Chénier, la
première et la cinquième. Je trouve une moyenne moins forte que
dans Y Idole, huit mots seulement ; mais je crois que cette
moyenne s'élèverait, si l'on poursuivait les recherches.
  Jean faisait remarquer la cadence du vers de Chénier, incompa-