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282                   LA REVUE LYONNAISE
raillant de trouver inconvenant qu'on parle des choses qui ne sont
pas honteuses en elles-mêmes, et d'appeler au contraire par leurs
noms celles qui sont vraiment répréhensibles. Voler, tromper,
commettre un adultère, sont des actes honteux, mais qu'on peut
nommer sans obscénité. Il est fort honnête de faire des enfants,
mais on ne saurait en parler sans inconvenance. Ces gens-là ajou-
tent beaucoup de choses du même genre contre la pudeur, quant
à nous suivons la nature, et évitons ce qui blesse les yeux et les
oreilles ».
  Ainsi l'objection s'était produite autrefois, et nous venons d'en-
tendre un moraliste pratique, en dehors de toute idée chrétienne,
y répondre simplement au nom des convenances naturelles. Eh
bien, nous nous rangeons à l'avis de Cicéron. Il y a bien, nous le
verrons tout à l'heure, à l'opinion qui traite certaines expressions,
certaines peintures, certaines descriptions, d'obscènes une raison
de morale, mais il y a aussi une raison de convenances et de bon
goût. Que les naturalistes se soucient peu des convenances et du
bon goût, libre à eux, mais qu'ils ne s'étonnent pas si on les en
blâme. Il n'y a pas besoin pour cela d'invoquer la religion, ni
même à proprement parler la morale, ce sont tout simplement le
bon sens et la tradition de l'humanité civilisée qui protestent.
Aussi dirons-nous aujourd'hui comme Cicéron le disait autrefois :
Il ne faut écouter ni les écrivains cyniques, ni les naturalistes
presques cyniques qui nous raillent de trouver inconvenant qu'on
parle de choses qui ne sont pas honteuses par elles-mêmes, et d'ap-
peler par leurs noms celles qui sont vraiment répréhensibles.
Suivons la nature et évitons ce qui blesse les yeux et les oreilles.
   Cette question préliminaire vidée, arrivons au fond de la
défense de M. Zola. Que les naturalistes aient violé les convenances
et le bon goût, ce n'est en effet qu'un détail s'ils ont mis dans leurs
Å“uvres une haute morale pratique, s'ils ont, pour employer leurs
phrases sonores, travaillé avec tout le siècle à la grande œuvre
qui est la conquête de la matière, la puissance de l'homme
décuplée.
   Si nous avons bien compris les arguments de M. Zola, ils se
réduisent à deux :
   « Les romans naturalistes ne sont pas immoraux d'abord parce