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696 LA REVUE LYONNAISE étrange monologue-, je n'ose l'appeler interlocuteur, las du rôle de personnage muet, ne se retirait, ne s'esquivait, avant la péro- raison tardive, secouant la tête et haussant les épaules. « La froide vérité... » 0 prédicateur du Verbe, que dites-vous là ? Froide, la vérité? Mais la vérité est vie, fécondité et joie, toutes choses chaleureuses ! La vérité, qui est la parole de Dieu même, est chaude, ardente, ignée ! Ignitum eloquium tuum vehementer. •k Démosthène se prépara par une étude austère à devenir, en effet, la force du peuple athénien (A-rçuou, 20Y|VOC). Son apprentis- sage d'orateur est légendaire : retraite souterraine, chevelure et barbe rasées, Thucydide plusieurs fois transcrit, cailloux mis dans la bouche, déclamations sur le bord de la mer... Récits controuvés peut-être; mais dont l'ensemble et l'accord témoignent d'une précoce énergie, non démentie par l'avenir. L'on a beau lancer vers cette haute renommée accusations sur accusations, elles retombent a ses pieds impuissantes. Démosthène n'est plus le nom d'un homme, Démosthène est le nom de l'éloquence même. Etait-il grand ou petit, laid ou beau? Fut-il pusillanime, v e r - satile? L'enquête, ouverte depuis des siècles, n'a pas résolu ces problèmes. Peu importe. L'imagination persévère à se figurer Démosthène grand de corps et grand de cœur ; et l'on n'accepte pas que cette cataracte d'éloquence ait pu jaillir d'une poitrine étroite, tomber d'une âme basse. Il n'y a qu'une voix aujourd'hui pour saluer l'homme égal à l'orateur. Le discours llepi oTstpavoj, lu par le jaloux Eschme, en pleine école de Rhodes, provoqua l'enthousiasme : « Que serait-ce donc, s'écria Eschme, si vous aviez ouï le monstre ! » La postérité se console de n'entendre pas le monstre en lui applaudissant à l'envi des Rhodiens. Ses rapports avec le Perse Harpale parurent suspects. Faute de preuves, force est de l'acquitter, sinon de l'absoudre. —On lui re- proche aussi le désastre de Ghéronèe. Le devoir du grand orateur