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célèbre collectionneur anglais lord Ashburnam, et restitués par son fils, grâce
à l'habileté des négociations de M. Delisle. N'est-ce pas aussi ce savant qui
nous a révélé, dernièrement, toutes les beautés, l'origine et les vicissitudes du
célèbre manuscrit illustré par Attavente que possède notre cathédrale ?
  Aujourd'hui M. LĂ©opold Delisle dote la science d'une nouvelle et bien impor-
tante publication tur les manuscrits possédés jadis par la célèbre abbaye béné-
dictine de Gluni, ancien chef d'ordre et dont l'Ă©glise Ă©tait la plus vaste de la
chrétienté. Quelques écrivains, à diverses époques, s'étaient plu déjà à donner
quelques précis sur cette grande collection. André Duchesne, dom Anselme Le
Michel, Etienne Baluze, dom Martène et dom Ursin Durand, Lambert de Barive,
avant la Révolution, avaient fait connaître une partie de ses richesses. Dans nos
temps modernes plusieurs Ă©rudits avaient aussi fait quelques recherches sur cette
collection, mais il appartenait Ă  M. LĂ©opold Delisle de nous donner un travail
complet sur cette bibliothèque, déjà en si grand renom, en 1432, que le célè-
bre concile de Bâlo, la mit en réquisition pour se procurer les textes nécessaires
aux travaux de l'assemblée.
   Je ne dirai pas tout ce qu'il a fallu de patientes et de savantes recherches
pour reconstituer cette vaste collection si souvent victime du temps, des révolu-
tions et de l'incurie de ses modernes gardiens; c'est Ă  l'aide de documents les
plus divers, dispersés çà et là, méconnus ou dédaignés que cette reconstitution
laborieuse a pu se faire. M. Delisle s'est servi, entre autres, d'un catalogue dressé
de 1158 Ă  1161, sous l'administration de Hugues III, contenant 570 volumes,
d'un rôle de livres prêtés par l'abbaye, en 1262 ; d'une liste des livres écrits, à
Cluni, de 1256 à 1275, ou donnés par Jean de Bourbon, de 1456 à 1485 ; d'un
catalogue dressé par dom Anselme Le Michel, et d'une liste de manuscrits
faite en l'an IX et qui ont disparu, et enfin des notes si parfaites rédigées par
M. LĂ©opold Delisle lui-mĂŞme, sur ce qui restait encore, Ă  Gluni de tant de mo-
numents.
    Mais ce savant a fait mieux encore. Certain de voir toutes ces Ă©paves se per-
dre de plus en plus, chaque année, il a pu les acquérir toutes de la ville do
Cluni au prix de 20.000 fr. pour le compte de la Bibliothèque nationale, Celle-ci
était d'ailleurs déjà riche en manuscrits et en chartes acquis par elle, en divers
temps et provenant de Cluni, dont la bibliothèque, longtemps mal gardée, était
livrée à toutes les dépradations, même aux écoliers du collège qui dépeçaient les
manuscrits pour en faire des couvertures de cahiers ou en découpaient les vignettes.
   Malheureusement, la Bibliothèque nationale n'a pas pu acquérir tout ce qui
restait encore de chartes au commencement de ce siècle, car, dit M. Delisle,
« c'est par milliers qu'il faudrait compter celles qui ont été détruites ou disper-
sées, et je citerai seulement un lot qui est entré, en 1838, au Musée Britannique
où il forme les numéi os 1538-1596, du fonds additionnel des chartes. » Du reste cette
immense quantité de titres n'a rien de surprenant et M. Delisle observe avec rai-
son « que l'importance de la bibliothèque de l'abbaye de Cluny répondait à la
place que ce célèbre monastère a longtemps occupée dans le monde chrétien et à
l'influence qu'il a exercée sur la civilisation du moyen âge. » A la fin du dernier
siècle,malgré les pertes déjà subies alors, la collection des chartes de l'abbaye de
Cluni était encore considérable. Lambert de Barive qui y a travaillé pendant vingt
ans, a dit d'elle : « Yingt armoires ne suffisaient pas à contenir tous les titres ; six
grandes malles remplies de chartes parmi lesquelles se trouvaient les originaux