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448 LA R E V U E LYONNAISE de magnifiques moissons sans qu'il soit besoin de dépenser un dollar d'engrais. Comment lutter avec des armes aussi inégales?... A côté de ce sombre tableau, le voyageur montre la riche proie que peurraient se tailler dans ce sol améri- cain des jeunes gens de famille, auxquels les capitaux ne feraient pas défaut, et qui préféreraient la vie rude et austère, mais libre et indépendante, de l'éle- veur, à l'oisiveté énervante de la capitale. Les pages qu'il a écrites à ce sujet sont empreintes d'un bon sens profond, et plus d'un, en les lisant, trouvera peut- être sa voie ; plus d'un le remerciera de lui avoir indiqué ce grand chemin de la fortune conquise courageusement et honnêtement. Je dois indiquer aussi le passage consacré à l'importation en Amérique de nos chevaux percherons, si fort appréciés de l'autre côté de l'Atlantique (pages 97 et suivantes). Je n'ai pu énumérer que bien sommairement quelques-unes des choses que j'ai notées en lisant ce volume, et l'espace me manque pour rappeler bien des passages qui mériteraient d'être cités. Mais que ceux qui veulent bien lire ces lignes fassent comme moi : qu'ils se reportent au livre lui-même. Ils y trouve- ront plaisir et profit. CH. LAVENIR. DE MALHERBE A BOSSUET. Études littéraires et morales sur le XVII' Siècle par VICTOR FOURNEL. Paris, Didot, 18S4. — Un vol. in-18, prix : 3 francs. Quittant pour un instant les études de critique littéraire sur les écrivains du temps présent, auxquelles il consacre tant de pages remarquables dans le jour- nalisme quotidien aussi bien que dans les Revues, M. Victor Fournel pousse une pointe d'un volume au milieu des grandes œuvres du dix-septième siècle. Une excursion de ce genre, faite en si aimable compagnie, est pour tenter le lec- teur. Car on y revient toujours, à ce siècle unique. A vrai dire, on peut trouver dans celui qui le précéda plus de verve, plus de vigueur, plus d'originalité. Mais jamais la pensée française ne s'exprima en un langage plus correct, plus choisi, plus ferme qu'au temps de Racine, de Boileau et de Bossuet. Quelle hauteur de vue dans cette philosophie profondément spiritualiste ! Quels honnêtes gens, comme on disait alors, que ces écrivains d'élite dont la gloire ne passera pas! -C'est en chapitres détachés, passant de l'un à l'autre, que M. Victor Fournel étudie quelques-uns des types du grand siècle. 1! semble que tout ait été dit sur eux, et pourtant, même après les maîtres, il reste toujours à glaner. Le livre dont je parle en est la preuve. Après un parallèle de Malherbe et de Boileau, après avoir établi la part res- pective de chacun d'eux dans la fixation de notre langue, M. Fournel consacre à Voiture et à Balzac une étude des plus nourries. Les chapitres qui suivent traitent de Molière et mettent le lecteur au courant des plus récentes publica- tions de l'érudition contemporaine sur l'auteur du Misanthrope et de Tartufe. Ils exposent les recherches qui ont été faites, les questions jusqu'alors insolubles que d'infatigables travailleurs sont parvenus à élucider, celles, et malheureuse- ment elles sont nombreuses, qui restent à trancher. Viennent ensuite le cardinal de Retz, dont le caractère et les œuvres sont appréciés avec une sûreté de cri- tique toute spéciale; Port-Royal et son historien, Sainte-Beuve; la Bruyère et les moralistes français. Les pages consacrées à Mme Des Houlières et à sa bergerie sont fort piquantes. La Muse nous y est peinte au naturel sous des