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318                  LA REVUE LYONNAISE
lecteur, en pleine civilisation chrétienne. A propos' de la Grèce,
m'objectera-t-on les Spartiates, offrant à leurs fils, pour les dé-
goûter de l'ivrognerie, le spectacle d'un ilote ivre ? Ce système
d'éducation n'était pas sans danger. L'effet contraire pouvait
se produire ; l'exemple entraîne, surtout l'exemple du vice,
et le voyou qui, levant un pauvre diable ivre-mort dans le
ruisseau, se disait avec mélancolie : « Je serai pourtant ainsi
dimanche, moi! », ce voyou n'était pas moins homme que l'ha-
bitant de Sparte.
    Le Maître l'a dit : « Un père ne donne pas un serpent à son fils
 qui demande du pain ». Et M. Daudet prépare à ses enfants, au
 lieu de pain, un serpent venimeux, un livre dépravateur !
    Les Pères de l'Eglise, des pères "aimants et prudents, ceux-là,
 autant pour le moins que l'auteur de Sapho, ne surent jamais
 conseiller, contre le péché impur, que la fuite. Ils se gardaient bien
 d'apprendre le vice à ceux qui ignoraient. Le dire du poète païen
 était souvent sur leurs lèvres : « Le plus grand respect est dû à
 l'enfant, ne lui préparez rien d'ignoble... » Mais M. Daudet pré-
 fère à ces autorités certain personnage de la comédie qui se jetait
  à l'eau, lorsqu'il pleuvait, pour ne pas se mouiller.
     Cependant, dira quelqu'un, la théologie, la médecine ne s'inter-
  disent pas l'enseignement des choses honteuses... Pardon! un
  ouvrage qui touche gravement, austèrement, sainement aux ques-
  tions de la science et de la religion diffère du roman qui conte
  pour conter, ne pense qu'à plaire ; et qui loin de contrecarrer les
  passions, les flatte et les encourage. Au surplus, ces ouvrages spé-
  ciaux ne sont permis qu'à ceux qui ont qualité pour cela. Ce n'est
  pas assez de « vingt ans » pour avoir le droit d'en prendre connais-
  sance ; il faut d'autres conditions, il faut de meilleures garanties.
      Je ne suis pas prophète ni fils de prophète, mais je me persuade
  qu'une réaction couve dans le silence, qui éclatera tout à coup, et
  dispersera aux quatre vents du ciel cette littérature de scandale,
  que la dégradation des intelligences et des moeurs a mise en si haute
  estime. Tout au plus quelque chercheur de bouquins remuera-t-il,
  dans cinquante ans, cet amas de conceptions lubriques, pour y
  prendre un exemple de l'ignominie où descend la pauvre nature
  humaine, non retenue par le devoir. Heureux ce friand de vieilles