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 Toscane, que l'on disait être assez belle, mais elle était d'une des moindres
 maisons souveraines de la Chrétienté, « n'y ayant pas plus de soixante ou
quatre-vingts ans » que les prédécesseurs du grand duc n'étaient qu'au
rang « des plus illustres bourgeois de leur ville ». Il faisait bien le renchéri
 pour un homme décidé à faire reine de France cette «bagasse» de Ga-
 brielle », oubliant que Marie de Médicis était la fille d'une archiduchesse
 d'Autriche et la petite-fille de l'Empereur Ferdinand, frère de Charles-
 Quint.
      Ce fut sur elle que se fixa, en définitive, le choix de ses conseillers,
et pour de bonnes raisons. Le grand duc Ferdinand, oncle de Marie, qui
 souhaitait une France forte comme le meilleur contrepoids à l'hégémonie
 espagnole en Italie, avait indirectement aidé Henri IV à triompher de la
Ligue et de Philippe IL II avait encouragé Venise, le plus puissant des
Etats libres à le reconnaître, et poussé Clément VIII à l'absoudre. Il lui
avait fait tenir sous-main de l'argent. Il s'était emparé du Château d'If
pour le mieux défendre contre les ligueurs de Marseille, le roi d'Espagne
et le duc de Savoie. En prêts, en secours, en frais d'occupation, il avait
dépensé ou avancé au roi de France 928.218 ducats d'or, qui, avec un
reliquat des emprunts de Charles IX, montaient à 973450.
      Comme il est d'usage dans la plupart des pays civilisés que l'épouse
n'entre pas en ménage les mains vides, le surintendant des finances,
Sully, qui avait à liquider l'arriéré des guerres civiles : une dette intérieure
et extérieure effroyable, appelait de ses vœux le mariage toscan comme
le meilleur moyen de contenter le plus gros créancier du royaume et de se
procurer par surcroît de l'argent frais. Alliance de famille avec un po-
tentat italien, excellente affaire financière, pouvait-on espérer mieux!
      Il y avait lieu de croire que la Cour de Rome se prêterait à ce calcul.
Clément VIII était florentin et il avait, comme Ferdinand, souci de l'indé-
pendance italienne. Sans doute, quand l'ambassadeur de France, Brûlart
de Sillery, lui exposa la demande en divorce, feignit-il de l'étonnement
et même un peu d'émotion, comme s'il ignorait tout. Mais cette attitude
était de style. On s'aperçut vite qu'il n'avait craint le « démariage » du
Roi que par crainte d'un « remariage » avec Gabrielle. Il soumit l'ins-
tance à une Congrégation de cardinaux, qui, réunie le 31 août, déclara,