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— 371 — LA POLITIQUE ÉCONOMIQUE DE ROME EN ASIE-MINEURE AU Ie1 SIÈCLE AVANT NOTRE ÈRE (*) Tant que la civilisation était demeurée simple dans ses goûts, et les Romains mesurés dans leurs dépenses, l'exportation et l'importation n'eurent pas une importance capitale dans la vie économique des Latins. Les peuples commerçants — Grecs ou Phéniciens — se chargeaient d'ame- ner sur les côtes d'Italie les produits d'une industrie savante, ou d'aller dans les régions encore barbares échanger contre les objets manufacturés les matières premières que ces régions pouvaient offrir. C'est cet état de choses que César rencontra en Gaule et que son récit laisse entrevoir. César nous parle à maintes reprises de ces mercatores, qui sur tous les points du territoire ont devancé l'armée romaine. Leur besogne était malaisée : il fallait d'abord franchir les Alpes, ce qui n'allait pas sans danger ; ils y frayèrent néanmoins le passage qu'à leur suite César s'ouvrit dans la montagne *. Déjà , dans les cols, les divers peuples percevaient des péages onéreux 3 : ces droits à payer pour les marchandises qu'ils transportaient, les mercatores devaient les acquitter à chaque groupement local 3. Les difficultés se présentaient à chaque pas ; si telle population recevait avec bienveillance ces commerçants étrangers 4, telle autre ne (*) Cette étude, composée avant la guerre, était entièrement écrite lorsque parut la thèse de Hatz- feld, les Trafiquants italiens dans l'Orient hellénique, Paris, de Boccard, 1919. Cet ouvrage analyse les mêmes textes que cet article et, avec beaucoup plus d'étendue et de pénétration, présente un tableau complet de la vie des négotiatores latins en Asie-Mineure. Toutefois, nous croyons que notre travail ne fait pas double emploi : il s'agit pour nous, en mettant en œuvre des textes, de montrer sur le vif une politique économique et des combinaisons d'intérêts qu'un Français, en 1931, peut méditer avec profit. (1) César, en partant pour l'Italie, envoie Servius Galba dans le pays des Nantuates, des Veragres et des Séduniens, voisins des AUobroges. Causa mittendi fuit, ajoute César, quod iter per Alpes, quo magno cum periculo magnisque cum portoriis mercatores ire consuerant, patefieri volebat. Ces. Bell. gall. III, 1. (3) Cf. texte précédent : Magnis cum portoriis. (3) César parle de Dumnorix qui avait affermé les portoria du pays des Eduens (Ibid. I, 18). (4) Comme les Ubii (Ibid. IV, 3) ou les Suèves (Ibid. IV, a).