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âmes : les lions lèchent leurs pieds, les alouettes chantent leurs louanges.
Par eux, c'est un peu le Paradis retrouvé et les beaux jours revenus de
la royauté sereine et pacifique de l'homme parmi la création. Que de
siècles de brutalité il a fallu pour que les fauvettes nous évitent, quel
isolement orgueilleux pour que nos paroles, nos inflexions et nos gestes
soient insensibles aux mésanges. Mais aussi comme les animaux ont tôt
fait de reconnaître un ami et comme ils sont émouvants les efforts d'un
chien qui veut pénétrer le sens de nos paroles et lire de toute son âme
notre pensée dans nos yeux. Vraiment celui-là est à plaindre que les ani-
maux n'ont point aimé comme un roi débonnaire, mais redouté comme
un tyran brutal et indifférent.
      Cependant que nous bercions nos pensées au souvenir du saint,
l'après-midi se mourait lentement et l'on pressentait le soir derrière les
arbres et la colline. Il me revint alors l'histoire du loup d'Agobio telle
que nous la conte frère Hugolin en ses Fioretti. Je proposai à Monique
de la lui dire comme une des plus belles fleurs cueillies dans le jardin de
saint François.
      « Les habitants de la petite ville d'Agobio étaient alors en grand
effroi à cause d'un loup très horrible qui tenait la campagne alentour,
dévorait les moutons dans les bruyères, menaçait les hommes quand la
nuit venait et rendait poltrons les plus hardis. Saint François étant passé
par la ville connut l'épouvante de ces hommes et les eut en grande com-
passion. Il résolut en son cœur de les délivrer du loup. Parce qu'il était
saint et savait l'âme des bêtes, il s'en fut à la rencontre de l'animal, sans
escorte et sans armes, si ce n'est le signe de la croix. Quand il vit le loup
s'avancer, la gueule menaçante, il se signa et très fermement lui dit :
      « Frère loup, au nom de Jésus-Christ, je t'ordonne de ne plus faire
« aucun mal à personne.
      « Aussitôt le loup se coucha devant lui et l'écouta en grande soumis-
sion. Alors saint François parla ainsi :
      « Frère loup, tu as fait endurer de grands maux à ceux de cette
« ville. Tu as mangé les animaux, qui sont comme toi créatures de Dieu,
« et tu as jeté la terreur parmi les hommes, que Dieu créa à son image.
« Tu mérites un très grand châtiment. Mais je sais que tu n'as fait tout