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428 JOSEPH CHINARD, SCULPTEUR Il reconnaissait que le talent du peintre est plus difficile que celui du statuaire, et disait : « Nous tournons autour de notre statue; le peintre est obligé de faire saillir les figures sur le plan où elles sont appliquées ; et puis nous n'avons à nous occuper que de la forme, quand le peintre a souci de la forme et de la couleur. » Il avait cet art si apprécié, si difficile, de saisir les traits, la physionomie même de son modèle, de donner à une froide pierre, l'air, la chaleur, l'expression et le mouve- ment de la vie. C'est ce qui a fait proposer pour son atelier cette inscription de Jean Brunel, poète d'Arles : Ciseau de Phidias, c'est ici ton empire, Tu commandes au marbre, et le marbre respire. Bérenger, professeur et membre de l'Académie, a dit : Pygmalion nouveau, quand son démon l'inspire, Chinard frappe ïs marbre, et le marbre respire. On a reproché à Chinard d'avoir plusieurs fois changé d'opinion politique, et d'avoir toujours été en faveur auprès des représentants des divers Gouvernements qui se sont succédé pendant qu'il vivait. On peut répondre que beaucoup d'autres ont fait comme lui, ce qui n'était pas étonnant dans un temps où les révolutions étaient aussi fréquentes. On peut aussi pour expliquer jusqu'à un certain point cette versatilité, donner une raison relative à l'art qu'il cultivait. Le temps qu'exigent les ouvrages de sculp- ture et la dépense qu'ils nécessitent, attachent, en général, les sculpteurs aux représentants de l'autorité de qui dépend leur sort. Cette appréciation, qui est vraie, n'empêche pas qu'il y ait de nombreuses exceptions.