page suivante »
UNE PROMENADE EN DAUPHINÉ 23 que de pacifiques détonations pendant les fêtes locales, ou pour saluer la présence dans le bourg de l'évêque diocésain en tournée pastorale. Guidé par le fermier, hôte unique de cette aristocratique demeure, le visiteur se défend mal d'une impression de tristesse quand, parcourant ces appartements nombreux depuis longtemps inhabités, son regard n'y rencontre que la froide nudité des murailles à peine interrompue, çà et là , par quelques tableaux, gravures ou tapisseries en fort médiocre état. Une de ces chambres cependant fait exception. Elle présente un lit, bas et large, avec un baldaquin d'où tombent de riches tentures. Cette couche somptueuse qui ne semble devoir appeler que des rêves de bonheur au sein d'un tranquille sommeil, est restée, affirme le cicérone, ce qu'elle était lorsque Louis XIII, passant dans la contrée, s'y reposa une nuit. De retour sur la terrasse, le touriste contemple d'abord le gracieux panorama qui se déroule à ses pieds, puis d'instinct sa pensée revient à ce manoir qui dessine près de lui ses lignes puissantes. Il se plaît alors à évoquer les vieux souvenirs, et sans peine, il revoit en imagination les grands seigneurs qui se sont succédé dans ce domaine autrefois plein d'animation, de mouvement et de vie, aujourd'hui silencieux comme un tombeau. Le premier représentant connu de la famille de Virieu, Guiffrey, vivait au commencement du xi e siècle. Un de ses descendants prit part à la croisade prêchée par saint Bernard. Martin de Virieu, dernierrejetonmâle de la branche aînée, exerça le rôle bienfaisant de conciliateur entre deux de ses puissants voisins, le comte de Savoie et le baron de la Tour-