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66 LA CÈNE. qui frappe le plus ; elle est composée d'une manière vraiment épique et dessinée puissamment. Ce personnage est surtout em- preint de force, il a quelque chose de militant, sa main dirigée contre sa poitrine paraît indiquer son cœur au Christ, comme déjà pénétré de la vérité que le maîire annonce, il semble prêt à agir, on devine en lui un robuste athlète de la vérité. La figure placée à la suite de saint Jean, est remarquable par la mélancolie pleine de douceur qui se môle en elle au recueillement religieux. Cet apôtre semble voir d'avance sur le front du Sauveur la couronne d'épines; sa têle est celle dont l'expression est la plus complexe et la plus moderne, ses pieds et ses draperies sont de l'élégance et de la grâce la plus exquise, le caractère qui domine dans la figure voisine qui est à l'angle de la table, est cel ui d'une foi et d'une résolution iné- branlable; la tête à gauche de celle-ci est d'une beauté de propor- tion, d'une grandeur et d'une simplicité dignes de la statuaire an- tique; son expression n'est pas moins saisissante, elle est toute d'adoration et d'amour. Les autres figures d'apôtres et celles des deux patrons de la chapelle placés debout au fond de la salle, par un anachronisme que l'exemple des maîtres autorise, sont, comme les autres, profondément religieuses et en même temps pleines de réalité. Déjà dans les compositions précédentes de M. Janmot, on avait remarqué ce caractère de réalité empreint sur ses personnages, taudis que beaucoup de nos peintres cherchent à reproduire dans les sujets religieux les types des maîtres antérieurs à la renaissance, que d'autres poursuivent surtout la ligne idéale et la beauté sculp- turale de l'antique, M. Janmot a toujours reproduit la physionomie moderne dans ses tableaux, un artiste vulgaire n'obtiendrait cette vérité de nature qu'au dépens de l'élévation des types. Ce qui constitue l'originalité du talent de M. Janmot, c'est la faculté de donner à ses figures beaucoup de nature et de vérité, et en même temps de maintenir ses types et. ses compositions à une grande hauteur religieuse. Les peintres qui recherchent avant tout l'idéale pureté de la forme, suivent les traditions de l'art antique, qui ne revivra pas. L'art agit sur l'homme moderne moins par la beauté de la forme que par l'expression, et les sentiments humains deve-