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                     UNE FEMME MURÉE                      397
    Gabrielle expliqua de la manière la plus positive le
déguisement de Roger, pour pénétrer dans le château où
il n'aurait osé se présenter sous son véritable nom, redou-
tant l'inimité du comte pour son père.
    Gaspard leva ses mains au ciel, et s'écria :
    — Vous me rendez la vie, vous me rendez l'espérance !
mais je suis bien coupable !
    Me voici,s'écria Roger qui était caché derrière le moine,
regardez-moi bien; ne reconnaissez-vous pas en moi le
frère jumeau de la comtesse de Mornieux, ma sœur ché-
rie ?de grâce ou est-elle ? rendez-la nous à tous, elle est
la vie de mon âme, et l'objet qui m'est le plus cher ici-
bas !
    Un silence se fit. Gaspard retomba épuisé. Tous les
assistants tremblaient.
    Tout à coup d'affreuses convulsions le saisissent et il
s'écrie :— Eloignez-vous, je me fais horreur à moi-même;
j'ai porté une main homicide sur la plus pure des femmes.
Je suis le meurtrier de mon épouse et de mon enfant ;
pleure, ô ma Gabrielle, et ton père et ton amie, tous les
deux vont disparaître à la fois.
    Puis, ii appela Emma à grands cris, et retomba sans
force sur sa couche.
    Quelques instants plus tard, il demanda à parler seul
au père Athanase ; tout le monde se retira; Gabrielle et
Roger étaient épouvantés, affolés de douleur. Rien ne
pouvait adoucir leur chagrin; leurs sanglots retentis-
saient dans l'appartement de Gabrielle.
    — Où trouver au moins le corps de mon Emma, disait
Roger, pour le couvrir de baisers et de larmes, et lui
rendre les derniers honneurs ? Mais Gabrielle ne pou-
vait répondre. Tous les deux frémissaient d'horreur à
 la pensée du crime et de la douce victime.
    Cependant l'un et l'autre se traînent dans la cham-
 bre du meurtre pour y retrouver le coips de la comtesse.
 Un affreux spectacle se montre à leurs yeux. L'apparu
 tement est dans le plus grand désordre ; de larges taches
 de sang, des boucles de cheveux blonds, quelques bijoux,
 quelques rubans épars; les draps manquent au lit, ils ont
 été le linceul de l'infortunée comtesse.
    Rogeréperdu poussa des cris déchirants;Gabriôlle l'en-
 traîna loin de cette chambre funèbre. — Eloignons-nous
 du théâtre de tant d'horreur, dit Roger;