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                     UNE FEMME MURÉE                      393
cuser ma chère Emma d'un amour coupable. Hélas ! serait-
elle en prison, 'elle si frêle, si délicate ? Je vous en con-
jure, bon sénéchal, repondez à mes questions.
   Le vieillard se souleva sur sa couche, sa pâleur était
effrayante, ses larmes coulaient lentement.—Vous cher-
cherez en vain la douce comtesse, damoiselle, je le répète
encore. Pour le troubadour, qui a apporté une si fatale
méprise , délivrez-le au plus tôt, c'est le désir de monsei-
gneur, il est au troisième cachot, après le grand esca-
lier.
   Gabrielle pria le père Athanase de descendre avec elle,
mais avant, elle voulut aller prendre elle-même des nou-
velles de son père.
   -r- Monseigneur ne peut voir personne aujoud'hui, lui
dit un varlet qui l'affectionnait et qui l'avait suivi dans
ses longs voyages ; il vous fait dire, demoiselle, d'écrire
en grande hâte à votre oncle Guillaume de Mornieux ;
envoyez-lui un prompt messager, qu'il se hâte d'arriver
au manoir.
   La jeune fille descendit tenir conseil avec le moine ;
le sénéchal dormait d'un sommeil fiévreux.
   — Ma chère fille, dit le père Athanase, un crime a été
commis, cela est certain. Votre père, abusé par la ten-
dresse innocente de Roger et de sa sœur, les a crus cou-
pables ; l'infortunée comtesse a-t-elle été victime d'une de
ces colères terribles, qui tant de fois ont épouvanté le
château ?
   — Le château qu'elle n'habite plus, dit lentement le
sénéchal.
   — A-t-elle cessé de vivre, ou ce que je crois plus pro-
bable, a-t-elle été conduite dans un couvent ? Envoyez
de suite un message au n>bie et puissant seigneur, votre
oncle , lui seul peut obtenir la vérité de son frère ; en
attendant, hâtons-nous de délivrer le fils du seigneur de
La Roche, de son indigne prison : mais auparavant, je
vous en conjure, prenez un peu de ce puissant cordial,
vos forces sont au moment de vous abandonner.