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DE LA BIBLIOTHÈQUE DE LYON 327 douteux, pris sur une ruelle, éclaire, à peine, ces recoins où sont enfouis cependant tant de trésors et, à la vue de ces lieux, il se croit reporté au XVII e siècle. Depuis ces temps lointains, rien n'a été fait pour leur, amélioration. A la voûte du cabinet des Manuscrits se voient encore deux génies ailés portant au ciel un médaillon de Louis XIV; à leurs pieds, brûle del'encens dansdenombreuses urnes de toute forme ; une boiserie en sapin supporte les manuscrits de tout âge, et une table à pieds vermoulus et tournés, contemporaine de Henri IV, recouverte d'un tapis à ramage en loques du temps de Charles IX ou de l'un de ses ancêtres, orne le milieu de la pièce. On s'y croirait dans quelque antique librairie de quel- que vieille maison forte. Les Incunables, c'est-à -dire les premières œuvres des presses lyonnaises, si actives dès le XVe siècle, ont un abri tout aussi imparfait que les manus- crits. « Une gouttière masquée par un meuble, m'écrivit un jour M. Monfalcon, s'est formée à l'angle d'un rayon supé- rieur. — Vint une averse énorme — les éditions du XVe siècle furent aussitôt submergées et quatre-vingts volumes de cette vénérable catégorie, coururent les plus grands dangers. Trois fois l'accident s'est renouvelé dans la même année. Un nouvel incendie est à redouter journellement. Les cabinets des Incunables et des Manuscrits sont enchevêtrés dans les bâtiments du Lycée et non loin des salles où l'on fait du feu. Le Comité des Bibliothèques et'des Archives, pour mieux en assurer la conservation, avait demandé à la Yille l'établissement dans la grande salle d'éta- gères grillées sur lesquelles on eût placé ces ouvrages et de vitrines dans lesquelles on eût exposé les plus rares ; mais l'Université a empêché cette grande amélioration, en tenant dans cette grande salle les réunions solennelles des distributions des prix et des ren- trées des Facultés, ce qui est désastreux pour les livres. Bien mieux, il y a quelques années, l'Université a demandé la démolition du grand vaisseau de la Bibliothèque parce qu'il donnait de l'om- bre à l'une de ces basses fosses sans air et sans soleil, fétides qu'on appelle les cours du Lycée. Est-ce que la Ville ne s'opposera pas enfin à ces continuels empiétements de l'Université dans les bâti- ments de sa Bibliothèque ?