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                                AVENAS                               217

   Jocus, « le jeu, » qui complète le nom composé de Bellijocus,
veut dire, selon les dictionnaires classiques, jeu, plaisanterie, facétie
de bon aloi, chez les auteurs de l'antiquité. Dans la latinité du
Moyen-Age, jocus a un sens plus étendu. Le glossaire de Ducange
le fait synonyme de hasliludium, qui veut dire escrime, exercices
militaires; et il renvoie au mol jocari, où on lit : « Jocari, hastiludio
concurrere, certare, ex Gallico jouter; » et le verbe français jouter,-
veut dire combattre avec des lances, des hallebardes, des piques,
ei, par extension, avec toutes sortes d'armes. C'est au point que l'on
appelait Jocasa l'épée donnée par le pape Léon III à Charlemagne
dans la cérémonie de son sacre : épée que l'on conservait pieusement
dans le trésor de Saint-Denis. Ce détail est encore de Ducange.
    On voit déjà où j'en veux venir; et, après cette exposition philo-
logique, le premier venu, qui connaît tant soit peu l'histoire des
sires de Beaujeu, conçoit l'étymologie de ce nom qui n'est que la
traduction de Bellijocus. Ici, le français et le latin sont contempo-
rains, je veux dire, ont été créés en même temps. Beaujeu a existé à
l'instant ou Bellijocus a remplacé Bogenis.
   En venant s'établir dans ce site abrupt, devenu le chef-lieu de leur
petit Etat, les nobles rejetons de la grande maison des comtes de
Forez, lancent à leurs peuples et à leurs contemporains une sorte de
proclamation, si j'ose ainsi parler. Leur maison sera le type de la
vraie chevalerie. Avec eux, on verra venir les goûts et les exercices
militaires, les fêtes et tournois, l'hospitalité aux troubadours, le res-
pect des femmes et la galanterie quelquefois excessive ; en un mot,
tout ce qui peut honorer, enrichir et rendre heureux le peuple et le
souverain.
   Tel est le sens de l'étymologie du nom de Bellijocus, Beaujeu. Et,
l'histoire atteste que ce glorieux programme a été généralement bien
rempli par les sires du Beaujolais.

                                  IX

  Puisque j'en suis aux étymologies, pourquoi ne chercherais-je pas
celle dç notre modeste Avenas, auquel il est temps de revenir ?