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LA VIE ET LES OPINIONS DE CHRISTOPÃÃŽLË DE GAMON 127 Quand tous les fruits sont cueillis, les arbres se dépouillent de leurs feuilles. La terre change d'aspect. Le cyprès, le buis, l'olivier, l'if, le houx, le lierre, l'yeuse et le laurier sont les seuls, « où la verdure dure. » Un nouvel acteur est entré en scène : L'hiver aux gourdes mains, en face mal plaisante, Roupieux, cazanler, devant moy se présente. Il marche accompagné de vens et de frissons, Et porte, en lieu de poil, des horribles glaçons. Encor ce vieil pleurard en tramblant me menace Si je ne veux chanter les beautez de sa face. Le poète s'exécute devant « le vieux pleurard, » et il le peint avec une vigueur, une vérité et une variété de détails qui ne le cèdent en rien aux précédentes descriptions. Ce petit poème se termine ainsi : Voila donc les saizons dont le jour naturel Nous demonstre inconstant le cours perpétuel : Et leurs âges font voir les quatre âges de l'homme, Qui, parmi leurs contours, sans retour se consomme ! Hah ! Destin importun, qni emportes nos jours ! Quand l'année est passée, elle revient toujours ; Mais, quand l'obscure mort nous a clos la paupière, Nous ne revoyons plus l'agréable lumière ; Et cependant, chestifs ! jamais nous ne visons Au fruit plus éternel des célestes saisons. * * Le Trésor des Trésors et le Discours de P astronomie inférieure, parus pour la première fois dans le Jardinet de Poésie (1600), sont deux petits poèmes, formant un ensemble d'environ six cents vers, dans lesquels Gamon a résumé la philosophie hermétique de son temps, mais sur un ton mystique qui, en relevant aux yeux de ses contem- porains le prestige de cette science, peut expliquer en partie le succès de cet ouvrage. On a vu qu'il avait été reproduit par divers