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I2 'LA REVUE LYONNAISE
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Mille basmes d'odeurs parfument les campaignes,
Et voit-on les chevraux sauteler aux montaignes.
Ces petits animaux courent à petits bonds,
Ou pour s'entre-cosser des pointes de leurs fronts,
Ou égouter le pis de leurs mères barbues
Qui s'est enflé de laict sur les plaines herbues.
Ne sent-on pas comme une bouffée des odeurs de nos prairies et
de nos montagnes dans ces tableaux'et dans ceux que nous allons
encore mettre sous les yeux de nos lecteurs ?
Les prez sont piolez d'un gracieux email
Rouge, blanc, vert et bleu : industrieux travail
De l'orfèvre d'en haut ! et la bergère lente
Tient ses béliers cosseus dessous l'herbe mouvante.
Les plus sauvages lieux viennent à printaner ;
Et les seps porte-vin veulent rebourjonner,
Mesmement le hurbec, bestelette maligne,
Commence à rongnonner le bourjon de la vigne.
Comme au voizin ormeau le lierre amoureux
Enlasse serrement ses brassets vigoureux :
Et le glaireux limas s'agrafe à la muraille,
Quand sa corne comme Othe, au ciel ofre bataille ;
Le jeune pampre ainsi, s'estendant pour grimper,
Teint de vergogne encor, commence à se harper
Aux chesneux eschalas, où le sep tourne et plisse
En replis rondelets sa branchette tortisse •
Et sa fueille largette au bord deschiqueté,
S'estendant, laisse choir son coton argenté,
Et monstre auprès de soy des vrilles et des pointes
En cornes d'escargot à leur paisseau conjointes.
Le poète se rappelle que le printemps est aussi la saison des com-
bats, et il maudit la guerre. Il conjure Mars de se retirer dans son
palais de Thrace, et de n'en plus revenir. On comprend mieux le
sentiment qui a dicté ces vers, quand on se reporte par la pensée aux
guerres civiles qui ont ensanglanté le Haut-Vivarais.
La.terre se transforme sous l'influence de la saison. Les moissons
futures apparaissent. Cérès