page suivante »
LA VIE ET LES OPINIONS DE CHRISTOPHLE DE GAMON 23
Quand il parle de Mars, il abonde en horreurs ;
Et quand d'un doux repos, sa muse n'est point vaine.
O braves Parnassiens, j'envie vos escrits
Qui rendent éternels vos célestes esprits
Et qui tirent vos noms des ombres de la tombe.
D'un vol presque divin j'irois au ciel voûté,
Si ma muse pouvait suivre ma volonté.
Mais d'un si beau dessein, Jeune Icare, je tombe.
On voit que ce poète était, du moins, modeste. Cette qualité
doit beaucoup lui faire pardonner.
* *
Guillaume Colletet, l'académicien, (qu'il ne faut pas confondre
avec son fils François Colletet, si cruellement traité par Boileau,)
consacre plusieurs pages, dans sa Vie des Poètes françois, à l'examen
des oeuvres de Gamon. « Ses premiers essais poétiques, » dit-il,
« furent imprimés à Lyon, l'an 1600. »
Il est à noter que Colletet, dans cette notice, ne mentionne même
pas les Pescheries, bien qu'il les cite dans un autre de ses ouvrages,
l'Art poétique. Peut-être ne les connaissait-il pas encore à cette
époque. En revanche, il s'occupe longuement an Jardinet de poésie
et surtout de la Semaine.
La première partie du Jardinet le satisfait peu: «Mais, mon Dieu, »
dit-il, «à quoy pensoit Gamon de traiter ces sujets après Ronsard, et
les traiter avec tant de dureté de mots et de stérilité d'invention ?
Comment est-il possible que luy , qui avait si bon sens, comme il
le témoigna depuis par sa divine Semaine, se soit imaginé..?» etc.
Colletet continue en critiquant les descriptions des quatre saisons.
Le tableau de l'automne trouve seul grâce devant lui. « J'y ai
trouvé, » dit-il, « quelques endroits qui ne m'ont pas tout à fait
déplu, comme la description naïfve qu'il y fait des vendanges; mais
cela est tellement imité d'un poème de Belleau que cette copie n'est
désirable qu'à cause de son excellent original, »